The fresh coolness of rain-washed air came through the jalousie into the cantina and he could hear the rain dripping off the roofs and the water still rushing down the gutters in the street and from the distance once more the sounds of the fair. He was about to replace the crumpled letter in the book when, half absently, yet on a sudden definite impulse, he held it into the candle flame. The flare lit up the whole cantina with a burst of brilliance in which the figures at the bar—that he now saw included besides the little children and the peasants who were quince or cactus farmers in loose white clothes and wide hats, several women in mourning from the cemeteries and dark-faced men in dark suits with open collars and their ties undone—appeared, for an instant, frozen, a mural : they had all stopped talking and were gazing round at him curiously, all save the barman who seemed momentarily about to object, then lost interest as M.Laruelle set the writhing mass in an ashtray, where beautifully conforming it folded upon itself, a burning castle, collapsed, subsided to a ticking hive through which sparks like tiny red worms crawled and flew, while above a few grey wisps of ashes floated in the thin smoke, a dead husk now, faintly crepitant... Suddenly from outside, a bell spoke out, then ceased abruptly : dolente... dolore !

Malcolm Lowry, Under the Volcano

Douleurs l’omoplate droit. Droite. On devrait dire la scapula, ça l’empêche pas de lancer. Niveau mail je fais le mort. Pense pas à la BNF de novembre. J’y pense pas, c’est moins vrai. Lis, entre les compte-à-rebours des stations du métro (jusqu’à douze), Under the Volcano à cause, grâce, aux notules. Écarquillante lecture. Relis plusieurs fois mêmes passages pour être sûr, ça m’arrive qu’en anglais, autrement la tête part, pense à autre chose ou écoute d’autres langues et ailleurs, l’étrangère me permet de me retrancher du monde vivant, vivant sans moi. C’est prodigieux cette fin de chapitre, vraiment. Le premier. C’est ça que je voudrais lire quand je relis l’XB1 et les autres dans mon /// : avoir un genre de ralenti ambiant, les visages éclairés par un 220V très jaune, très jaune comme dans les rues de Morlaix, sous l’éclairage public, la nuit, pluie, Nesko devant au fond de la pente, invisible, noires les pupilles, dedans les reflets de nos quatre corps et le jaune électrique vaporeux. J’ai pas peur, plus peur, de me laisser gorger par d’autres textes et d’autre langues que miens, miennes, que mes doigts boivent pendant que les phalanges tâtent, le premier jet on dit, parce que je sais maintenant que j’ai les doigts pour, que je pourrais tenir sous le poids des autres sans peur de faire péter les nerfs au niveau des poignets, même si derrière ça lance des fois la scapula du coup. Pas sûr que ce soit lié mais (et je reviens sur la fin de ce chapitre, le premier) c’est pas une cantina c’est un saloon, une scène de saloon, mais minuscule, super lente, lente comme lentement je lis chacune des pages (deux fois dix plus X par jour), super lentement, en refaisant plusieurs fois l’aller-retour vers l’origine du paragraphe et l’origine du paragraphe précédant celui-là, lente comme le mouvement du bras, du coude, pour lever le verre du comptoir jusqu’aux lèvres, et, déclic, lorsqu’il, Laruelle, plonge ces lettres, peu importe qui les a écrites à qui et pourquoi, lorsqu’il plonge ces lettres qu’il vient de lire, voyeurisme, papier, des missives avortées du Consul à Yvonne, quand il les plonge ces lettres en pleine flamme, l’instant au cours duquel la flamme crépite, chacun des visages stockés là face à lui dans ce saloon, la cantina, s’éclaire, super brièvement, on (c’est-à-dire toi, moi, nous, Laruelle, le barman, peu importe) remarque sur chacun d’entre eux quelques détails vestimentaires invisibles à l’oeil nu jusque là, mais ça dure une seconde, à peine plus, et tous ces anonymes, cravates défaites, chemises blanches, une fois l’éclat de la flamme tari, soit juste après le contact entre le papier et la flamme, tous autant qu’ils sont et qui qu’ils puissent être, s’en retournent au néant, rien, totale obscurité, et se replient sur eux tous comme les feuilles de papier, les lettres avortées du Consul à Yvonne, ces lettres, toutes ensemble, se replient sur elles-mêmes, comme un château en feu dit-on, collapsing, collapsing, un mot d’ailleurs que j’ai toujours, comment dire, en anglais, plutôt estimé.


jeudi 6 septembre 2012 - mercredi 27 décembre 2023




31127 révisions
# Objet Titre Auteur Date
Article publié Article 190324 GV il y a 16 heures
Les plus lus : 270513 · 100813 · 130713 · 120614 · 290813 · 271113 · 010918 · 211113 · Fuir est une pulsion, listing adolescent · 120514 ·

Derniers articles : 190324 · 180324 · 170324 · 160324 · 150324 · 140324 · 130324 · 120324 · 110314 · 100324 ·

Au hasard : 111023 · Rivage au rapport · 270916 · 111108 · 230123 · 200614 · 220113 · 300613 · 010221 · 130616 ·
Quelques mots clés au hasard : Ishmael Reed · Anselm Kiefer · Yun Sun Limet · Croquis · Miguel Espinosa · Vivant Denon · Stéphane Vanderhaeghe · Dragon Quest · Lewis Carroll · Moritz von Oswald · Philip Glass · Hiroki Kikuta · Gauz · Michal Michalik · Glenn Gould · La Quatrième Dimension · Hélène Sturm · Alain Damasio · Bong Joon-ho · Homosexualité · Katsuhiro Otomo · Fabien Clouette · Meredith Monk · Laurent Grisel · Cosmas Polìtis · Grégoire Hetzel · Ariane Mnouchkine · Cole Swensen · Seymour Mayne · Evry

Guillaume Vissac est né dans la Loire un peu après Tchernobyl. Éditeur pour publie.net entre 2015 et 2022, fondateur en 2023 du laboratoire d’édition Bakélite, il mène également ses propres chantiers d’écriture et de traduction, principalement en ligne (mais pas que).

Livres : Vers Velvet (Pou, Histoires pédées, 2020). Accident de personne (Othello, réédition 2018) · Le Chien du mariage (traduction du recueil d'Amy Hempel, Cambourakis, 2018) · Mondeling (avec Junkuu Nishimura, publie.net, 2015) · Coup de tête (publie.net, 2013, réédité en 2017) · Accident de personne (publie.net, 2011) · Livre des peurs primaires (publie.net, 2010) · Qu'est-ce qu'un logement (publie.net, 2010)