Ulysse par jour



  • 220613

    22 juin 2013

    Une espèce de fatigue physique comme une substance noire qui te poisserait les os, te ferait peser plus lourd. Ca me lance dans les épaules les omoplates les nerfs. La tête regarde.

    En cliquant quelque part sur Facebook je tombe sur cet article qui mentionne ce projet : un type prend une photo Polaroid par jour jusqu’à sa mort. Au-delà du simple trait de ressemblance qu’il peut y avoir entre son truc et le mien, me retrouve tout seul face à l’écran dépossédé de moi-même, comme si j’avais, en fait, vu un fantôme, le mien.

    Journée passée sur le dos d’Ulysse, littéralement : poursuivre la migration des anciens sur le nouveau site Spip. Me vient pensée suivante : revoir les tags horaires. Actuellement regroupentdes plages importantes d’une heure ou d’une demi-heure, copie conforme des heures déjà fixées en amont par la critique, et reprise notamment dans le Julián Ríos. Pour l’instant ça fonctionne car les plages ne se chevauchent pas. Lorsque ce sera le cas, ça posera problème, car ces plages, qui pourront se croiser (par exemple : de 8h à 8h45 chez Stephen et de 8h à 8h45 chez Bloom), ne seront pas toujours de même amplitude (par exemple : de 9h40 à 10h05 chez Stephen et de 9h40 à 10h15 chez Bloom), par conséquent il sera impossible de faire coexister ces deux plages horaires dans un même tag. La solution à ce problème ce serait revenir à l’idée générale de base, à savoir créer un tag par minute (un pour 8h01, un pour 8h02, etc.), ce qui complexifierait complètement l’usage des tags horaires, mais qui en permettraient aussi une meilleure lecture. Demeure la question de l’attribution des heures : comment décider (ou déduire) quelle phrase se déroule à quel moment ? Deux possibilités, toutes deux arbitraires évidemment : nous connaissons, grâce à la critique, le temps général de chaque chapitre (par exemple, pour Télémaque 45 minutes), temps que nous pouvons diviser par le nombre de billets dans le chapitre correspondant (toujours dans le cas du chapitre Télémaque, 365), ce qui nous donnerait un changement de minutes tous les huit fragments (8.1 pour être exact). L’autre possibilité serait de diviser le nombre de minutes (45) non plus par le nombre de fragments mais par le nombre de mots (7166), ce qui nous donne approximativement un changement de minute tous les 159 mots. De moi-même, j’aurais tendance à privilégier la première option, dont il me semble qu’elle serait plus précise, mais qui a le gros inconvénient de rendre impossible la désignation des heures durant la publication même, puisque serais forcé d’attendre d’être au bout du chapitre pour connaître le nombre de fragments total. Bien sûr, je pourrais tout aussi bien me désintéresser totalement de cette question 1, l’intérêt dans la navigation du site étant a priori limité à une partie du texte uniquement, soit le matin, lorsque Bloom et Stephen vivent des choses différentes de part et d’autres d’eux-mêmes (mais je peux me tromper, me souviens mal de l’organisation interne du reste du bouquin). Toutes ces considérations mises à part, et hors le système de tags un peu complexe à gérer, j’adorerais que nous puissions, lecteurs, savoir chaque jour, devant le texte, quelle heure il est à l’intérieur.

    Mueller (113 mots) :

    Le quartz dedans leurs paumes râpées, les corps,
    leurs yeux immenses comme des museaux velus, ont
    du mal à descendre le long de la falaise. Le Cap
    les guide avec sa voix rauque & raillée. Il sait
    qu’un simple faux mouvement, un seul appel d’air
    ou un manque d’équilibre conduirait chaque corps
    encordé à valser dans le vide & à s’écraser sous
    ce vide sur la plage en contre-bas. Quelque part
    dans les profondeurs, au niveau du sable, on les
    observe, on les regarde, on attend la chute. Une
    gerbe de salive fouette chaude la joue, l’oeil &
    la bouche des corps : c’est la voix de Mueller :
    mélangée à l’air libre elle invente des embruns.

  • 070713

    7 juillet 2013

    Si le projet Ulysse me passionne tant, indépendamment de l’écriture de mon truc, qui est un texte parallèle au texte original bien plus qu’une traduction au sens propre du terme, c’est aussi car il me permet une lecture réelle de Joyce. Les deux précédentes lectures (2004, 2011) n’ont rien laissé dans ma tête presque. Celle-là, qui me fait lire relire mettre les pieds en langue, est différente. Dans les #Ulysse du jour (751 à 760), Stephen, sur la plage (chapitre 3 : Protée) projette une partie de sa vie intérieure sur son environnement proche (un corps de chien jeté par les vagues ; on l’appelle, lui, dogsbody), y compris une reconstitution historique de vies antérieures, plusieurs siècles plus tôt. Cette attention me force une lecture lente dans les yeux dans les doigts, je vais toujours si vite quand je lis. L’écriture de l’Ulysse, lui, n’est rien que la retranscription clavier de ma version mentale, affichée là durant lecture. Le texte que je produits puis mets en ligne, par conséquent, n’est qu’un dommage collatéral du lire, un effet secondaire.

    Pressé pouvoir écrire ///. Des passages entiers sont écrits sous mon scalp. Je crains, à l’heure venue de l’écriture, de tous les mal écrire. Mais hâte.

    Sur /// toujours, pensais que c’était juste de mentionner jamais les langues, les pays, ne s’en tenir qu’aux villes, nommer une monnaie commune universelle, le $$, mais c’est faux, c’est pas juste c’est raté, c’est mal comprendre la marche du monde. Faire l’inverse : multiplier les langues, les frontières mouvantes, les conversions de monnaie à taux irréguliers, l’instabilité politique, humaine et policière.

    Suite des relectures Mueller pour le rouleau : la fuite dans le désert et puis les monologues interminables de celui qui dit s’appeler Imke Leal (les publications de ce passage se sont étalées, quand même, du 18 février au 19 mars). Dessus j’écoute des voix bulgares. Reprends plus en détail trois ou quatre jours qui n’ont pas le bon nombre de caractères par vers (47 ou 48). Avec le temps, les vers justifiés sont devenus un exercice naturel. Les réécrire c’est compliqué : soit on bidouille via la ponctuation soit on réécrit tout de zéro. Peut-être aussi pour ça que je l’aime, cette pratique : le premier jet est quasiment définitif. La fraîcheur de la langue on la glue dans de l’ambre.

  • 100713

    10 juillet 2013

    Off encore. Termine la migration d’Ulysse de l’ancien vers le nouveau site Spip, soit 350 billets pelletés à la main en un peu plus de six mois (on est dans les délais).

    Rendez-vous chez le neurologue à 16h, ressorti cinq. Des questions sur la texture de la douleur, la fréquence, la localisation spatiale, le goût. On parle de l’émission sur France Culture, on arrête le paracétamol, Lamaline. Ce que me dicte l’ordonnance ce sont des noms issus de la chimie moderne : ça s’appelle Propranolol, un traitement de fond qui ralentit le rythme cardiaque et me comprimera la cage thoracique, au début, et Relpax, contre les crises, de la famille des Triptan. Devrais aussi noter mes douleurs, tenir un agenda des crises et j’ai envie de répondre : tous les trucs que j’écris ça correspond à ça.

  • 300713

    30 juillet 2013

    Fait des rêves d’extrême-gauche (mais tu sais en quoi ça consiste, toi, des rêves d’extrême-gauche ?).

    Sabine Huynh, via Twitter, attirait hier mon attention sur cet article intitulé "Du cliché en traduction", un truc très intéressant à lire et sur un thème qui ne m’avait en réalité jamais trop effleuré jusque là, raison pour laquelle je suis revenu, a posteriori, sur mes quelques mois de pratique d’Ulysse, me demandant ce que j’avais pu faire de ces clichés et il me semble que la réponse est très simple : ma pratique de l’anglais étant tout de même limitée, et n’étant pas réellement bilingue, il n’est pas du tout impossible que ces clichés anglais potentiels je ne les ai pas, tout simplement, identifiés comme tels, raison pour laquelle je ne me suis pas creusé la tête pour déduire comment je devais les rendre en français. C’est une vraie possibilité. Ce n’est pas ce qui me cause le plus de réflexion dans ma pratique régulière de la traduction anglais-français, mais plutôt l’ensemble des mots valises et créations langagières dont Joyce est friand (deux mots collés ensemble, par exemple, comme les Cocklepickers du chapitre Protée) ; comment faire, littéralement, pour les rendre ? Mon premier réflexe, ce serait de les conserver coûte que coûte, quitte à tomber dans une espèce d’abstraction. C’est ce que fait un peu, parfois, la traduction 2004. La version de Morel, parue en 1929, est plus économe de ce type d’invention, tout simplement, peut-être, car le français ne s’y prête pas ? Une autre solution, ce serait d’user de ces néologismes sans nécessairement coller au texte anglais, et en inclure, par exemple, quand le texte français l’autorise ou le suggère, et refuser le mimétisme de situations. C’est une réflexion à voix haute consignée par écrit. Ce que je veux dire, c’est que tout est frêle, rien n’est figé.

    De Sabine Huynh je lis ce texte, Ma, publié ces jours-ci dans la revue Nerval et dans lequel je crois retrouver, par moments (peut-être car j’ai envie de les voir), c’est très diffus, des impressions d’Amy Hempel, en moins éparpillé. Je le lis en écoutant, derrière, à faible volume, un album qui s’appelle Meadow Rituals et qui va tourner, en boucle, deux fois de suite, sans que je m’en rende compte.

    Elle a fini de manger sa glace, ses yeux trouvent une poubelle. Elle essuie ses doigts collants sur son pantalon. Elle n’a même pas la force d’ouvrir son sac pour y chercher un mouchoir en papier. Éreintée, s’il faut la résumer en un mot, elle qui a subi une IVG dix jours auparavant. Dans son portefeuille, elle conserve une photo de la dernière échographie : des taches de lumière dans une galaxie obscure. Elle pensait qu’elle oublierait ce jour, ce lundi trois septembre deux mille douze (le bébé serait né en avril deux mille treize), que le sommeil la laverait de tout, qu’elle se réveillerait à la fois légère et forte, soulagée. « Mon bébé est au fond d’une poubelle et je ne peux en parler à personne » ont été les premiers mots qui ont traversé son esprit encore aux prises avec les brumes de l’anesthésie.

  • 310713

    31 juillet 2013

    J’ai prohibé l’usage des verres à l’intérieur de moi-même. J’ai relancé mon abonnement mensuel à Mediapart, coupé en juin 2011, suite à une opération mentale rapide, laquelle avait conclu que l’abonnement à Spotify (9.99€ par mois), fraîchement ouvert à l’époque, pouvait être financé quasiment intégralement par l’arrêt de Mediapart (9€ par mois). Les 9€ n’ont pas bougé, c’est toujours le coût mensuel. Aujourd’hui, je le finance par une renégociation de mon abonnement de téléphonie mobile qui passe de 39 à 29€ par mois. Bien évidemment, ces élucubrations financières sont complètement impropres à la réalité de mon compte en banque, lequel n’a pas été vérifié par l’un de mes yeux humains sur le site dédié de ma banque depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois.

    Du grain à moudre sur ce que je disais d’Ulysse, hier, et sur la traduction en général, sur les mots-valises (qui sont plutôt, en réalité, des concaténations occasionnelles de mots), et l’exemple le mieux choisi serait encore le dogsbody, littéralement corps de chien, mais en un mot, soit le surnom que donne Buck Mulligan à son coloc et (vraisemblablement) ami Stephen Dedalus. Pour l’instant, compte tenu de l’avancée actuelle du texte, c’est un terme que l’on retrouve à deux reprises, dans le chapitre Télémaque, en Ulysse 62 et 75. Pour dogsbody, Morel dit corps de chien, la traduction de 2004 préfère cabot et j’ai, quant à moi, hésité à choisir corps de clebs, pour l’allitération, mais je suis revenu, pour l’instant, temporairement peut-être, à corps de chien. Ce qui est intéressant, c’est de savoir comment rendre la fusion des deux mots en un seul. Jusque là, je l’ai laissé tel quel, en trois mots, renonçant à en faire un corpsdechien, mais il est aussi possible d’en faire un corps2chien voire un kor2chien (ou un kor2clebs, pourquoi pas), qui serait une bonne façon de rendre, en français très moderne, les expérimentations langagières de Joyce. Et le fait est qu’aujourd’hui, premier jet de l’Ulysse dit 791, ce que j’écris c’est ça : corps2chien, tel quel.

  • 150813

    15 août 2013

    J’échange mes yeux avec ceux d’H. : je lis son Dunwich traduit, il me conseille sur comment rendre les sons et les délires masturbatoires de Stephen à la fin du chapitre Protée, on est une bonne équipe. Quant au reste de la journée d’août... (mais qui ça peut intéresser le reste de cette journée d’août ?)

  • 280913

    28 septembre 2013

    Qu’est-ce que la vie ? Qui pourrait le dire ? puisque nous ne la recevons qu’en dépôt, pour une durée limitée, et jamais à l’état chimiquement pur ; nous nous affairons dans la fourmilière humaine, notre vie consiste à consommer et à être consommé.

    Imre Kertész, Journal de galère, Actes Sud, traduction Natalia Zaremba-Huzvai et Charles Zaremba, P. 154

    Je me sers finalement de ma Kaoss Pad hors sa boite pour un rythme électro qui est celui d’un piano qui, dans la réalité du jour, s’appellerait The Fall.

    Dans son toujours précieux journal de bord des Vagues, Christine Jeanney met en ligne un passage qui, outre la prémonition de la disparition de Percival, présente cette phrase en apparence anodine :

    My heart turns rough ; it abrades my side like a file with two edges

    Je propose en commentaire deux versions de cette même phrase, l’une "Ulysse style", l’autre plus régulière :

    Mon cœur se fossilise, il me charcute les côtes comme une lime à deux lames

    *

    Mon cœur se durcit, il frotte contre mes côtes comme une lime à deux faces

    Quant à la version de Christine, la voici :

    Mon cœur devient rugueux, il m’use les côtes, comme une lime avec ses deux faces

    Et je me rends compte, mais après avoir joué le jeu des méninges, après, aussi, avoir couru mes 19 min 12 (3.07km), avant que la pluie fine s’accroche à mes épaules, que cette version est plus douce, bienveillante, ce qui correspond bien à la langue de Louis, narrateur à ce moment des faits, affecté par la vision de son camarade qu’il vient d’avoir (une vision de sa mort). Cette idée de douceur fait naître en moi, bien indépendamment de ma volonté propre, et fort désagréablement je dois dire, l’idée que ce serait une langue féminine, ce à quoi je ne crois pas, ce qui m’a toujours écœuré. Cette pensée automatique a au moins le mérite de me faire réaliser quelque chose : mes traductions à moi sont agressives, manquent de douceur. Ca peut parfois se prêter à l’Ulysse : tant mieux. Moins, par exemple, à Amy Hempel, qui mâche une langue assez onctueuse, finalement (la brièveté n’implique pas forcément la sécheresse). Voilà ce que je dois creuser dans cette partie de mon travail.

  • 051013

    5 octobre 2013

    L’Ulysse a presque 300 coups d’avance. Je termine le 900 ce matin, ce qui correspond à la fin du chapitre Protée, 6.32% de la surface finale. Depuis une semaine environ, l’affichage des cartes via Openstreetmap ne fonctionne plus. J’ignore pourquoi. Pensais à un bug momentané qui se corrigerait lui-même mais non. Sais pas si j’ai la force de remonter 600 articles pour corriger, à la main, un par un, chaque PS pour le code. Quoi qu’il en soit, j’estime à moins d’une vingtaine le nombre de personnes intéressées par le projet Ulysse. Est-ce que ça vaut le coût de remonter 600 articles pour moins de vingt personnes ? Est-ce que ça vaut le coût de passer X années là-dessus ? Mais admettons que j’ai vraiment envie d’arrêter : pourrais même pas.

    18h41, écris un incipit possible pour /// 2 composé de 16 vers justifiés de 30 caractères, soit un total de pile 89 mots.

    Blue Jasmine à Bercy. Comme l’a dit je ne sais plus quel voix blanche de la cabine de douche, tout le film bascule sur un mot, ce mot c’est le mot rope.

  • 191013

    19 octobre 2013

    Un an et demi après avoir entamé la traduction d’Ulysse chaque jour, j’atteins enfin ce qui dans mon esprit est le vrai incipit du roman :

    Mr Leopold Bloom ate with relish the inner organs of beasts and fowls.

    Sur la monétisation des choses (d’Ulysse mettons), pourquoi ne pas adopter la méthode webcomics ? Ouvrir une boutique parallèle en y linkant (déjà) mes livres Publie, et des epub maisons des chapitres d’Ulysse, des épisodes brefs, le montant à verser serait laissé au choix, et puis au-delà des gadgets, des t-shirts, ce genre de bizarreries (mais c’est pas important).

    Via Antoine Bréa lecture du blog de Pierre Vinclair, que je découvre, et notamment cet extrait sur Chongqing. Pas complètement renoncé à écrire sur cette ville (peut-être l’intégrer à /// ?).

    Autrement ri-en, vraiment, écrit comme ça, en deux syllabes disjointes. Une fatigue très pénible et très lourde, l’incapacité à faire, incapacité à dire. Ecrire j’en parle pas. Imaginer au mieux, mais plein d’interférences, la tête comme un sous-sol après le viol de la fracturation dite hydraulique.

  • 091113

    17 novembre 2013

    Dans le rêve, tu partais dans les montagnes et tu vivais de marche silencieuse, d’abandonnement systématique, de squat dans des chalets fermés. Dans l’un d’eux (mais ce n’est déjà plus un chalet c’est une vieille maison en pierre, et ce n’est plus la montagne c’est le sud intérieur), le propriétaire vient te voir et te propose d’y vivre légalement. Dans cette même ville, tu visites une maison japonaise avec vue sur la mer tumultueuse. Mais c’est faux. Cette maison n’abrite pas des gens mais des bêtes, des chevaux nez plantés dans leurs râteliers pleins.

    Tu te réveilles sur cette phrase, la fameuse : Leopold Bloom ate with relish the inner organs of beasts and fowls. Cherches une autre version plus correcte pour Ulysse. Déguster par exemple. Leopold Bloom aime déguster les bons organes des bêtes & des volailles. Mais aime déguster n’est pas bon, car c’est une action qu’il est en train de produire au moment où l’on parle, le Leopold, pas un commentaire général sur ses goûts gastronomiques. De même le mot volaille t’ennuie, il est trop long. Te remémorant cette phrase, mot après mot, tu as d’ailleurs fait une erreur, remplaçant fowls par fauns, ce qui t’arrangerait finalement dans ton travail : Leopold Bloom déguste & goûte les bons organes des bêtes & faunes. Sinon, pourquoi pas coqs ?

    Une après-midi de novembre. Boire du thé, goûter le miel fruité venu de la ruche d’H., qui vient de nous en envoyer douze pots.

  • 101113

    18 novembre 2013

    Des algues recouvraient la pierre. Les semelles glissaient. On entendait un bruissement multiple, comme la fuite de centaines de crabes, l’éclatement de bulles d’air ou de baies marines et le frémissement imperceptible des moules incrustées jusqu’à mi-hauteur des madriers.
    Une fois, Maigret manqua le pied et sa jambe s’engagea jusqu’au genou dans une flaque d’eau.
    Il ne voyait plus l’homme, mais il était dans la bonne direction.
    L’autre avait dû gagner cet endroit alors que la marée était plus basse, car le commissaire fut soudain arrêté par une mare large de deux mètres. Il en tâta le fond de son pied droit, faillit vaciller en avant.
    En fin de compte, il se suspendit aux arc-boutants des pilotis.
    Ce sont de ces moments où il vaut mieux ne pas être vu.
    On esquisse des gestes auxquels on n’est pas préparé. On rate à tout coup, comme un mauvais acrobate. Mais on avance pour ainsi dire de par la force acquise. On tombe et on se ramasse. On barbote, sans prestige, sans beauté.

    Georges Simenon, Pietr le Letton

    Tu rêves tellement de rêves différents et, parfois, contradictoires, qu’il t’est à présent impossible d’en rendre compte ici, tout simplement car il t’est impossible de les délimiter, comme il te semble impossible de reconnaître le nom d’une ville par rapport à une autre lorsque tu les observes étalées, enchevêtrées en 2D sur photo satellite. Seul l’un d’entre eux, très vif, te reste en tête au fer, mais celui-là, tu le sais bien, il t’est impossible d’en prendre note ici.

    Correction des cartes Openstreetmaps dans Ulysse. Ont dû changer leur code. Quoiqu’il en soit c’est rectifié pour les Ulysse actuels et à venir, mais pas pour les 650 précédents qu’il va falloir corriger à la main. Tu regrettes amèrement t’être contenté de copier/coller le code dans la rubrique PS de Spip et de n’être pas passé par un chemin détourné, en l’occurrence une iframe par lieu, ce qui te permettrait de n’avoir que quatre ou cinq fichiers à modifier au lieu des 650 pages actuelles. En réalité, tu as d’abord spontanément pensé à une balise <?php include ?> que tu utilisais laborieusement à quinze seize ans, et ensuite, seulement, à la balise <iframe>. Mais sachant que les codes d’intégration Openstreetmaps sont déjà, à la base, des iframe, est-il possible de faire rentrer une iframe gigogne dans une autre ? Comme ce serait plus simple de savoir réellement ce que tu fais et de ne pas en permanence bidouiller des bouts de code inconnus ou inintelligibles...

    Tu as besoin, pour une traduction, d’un synonyme argotique de pénis. Voici la liste qu’on te donne : biroute, bistouquette, bite, braquemard, braquos, chibre, dard, gourdin, kiki, mandrin, noeud, nouille, pine, poireau, quéquette, queue, teub, zboub, zézette, zguègue, zigounette, zizi, zobe. Avec H. tombez d’accord sur zboub et zboub it is. Par ailleurs, il existerait neuf synonymes français du mot homosexuel mais zéro pour hétérosexuel. Le jeu de mot straight razor (à la fois rasoir droit et rasoir d’hétéro) ne semble donc pas traduisible en français.

    Couru 3.89km, deux tours du lac, 25 minutes, Metal Machine Music sous la surface du scalp (écrire dessus on peut, courir dessus c’est moins agréable). Dur de reprendre ton souffle. Tu te souviens d’avoir été asthmatique, enfant, mais ce sont des souvenirs fictifs, tu te souviens mal de ces scènes, qui étaient des crises, et tes souvenirs sont liés aux récits qu’on t’en a faits après coup, ce qui explique pourquoi tu te vois comme à la troisième personne dans ces scènes. Ce dont tu te souviens, c’est d’avoir appris à te servir de l’inhalateur et du jour où l’on t’a dit, quelque part hors du département, que la Ventoline faisait partie des substances dites dopantes, en cas de contrôle après un évènement sportif.

  • 301113

    8 décembre 2013

    Par contamination spatiale, ni plus ni moins, tu te retrouves avec un pectoral en moins, c’est-à-dire un seul poumon, soit un cœur inexact, incomplet. Ce que cela signifie, au quotidien, dans le rêve, c’est une incapacité à aimer correctement et à trancher correctement dans l’accord des pluriels.

    Ulysse : mise à part l’incongruité des chiffres de ce week-end (lundi la mise en ligne de l’Ulysse 666, mais dans la progression réelle tu atteins les 6.66% ce jour), tu tiens le rythme. Le rythme, c’est d’écrire en amont 0.05% par semaine (soit dix fragments - tu n’oses plus écrire phrases). La mise en ligne quotidienne, elle, bien sûre, est plus lente (sept par semaine), et tu approches doucement mais sûrement l’avance d’une année.

    Tout le monde cherche à te taper du fric. Non pas des proches ou des collègues ni rien mais des personnes bien intentionnées, menant des projets pour la plupart intéressants, lançant des souscriptions qui vont probablement réussir à atteindre leurs objectifs pécuniers, et c’est un modèle de financement pertinent, mais ça commence à t’ennuyer. Tu ne prêtes plus tellement attention aux projets que tu as modestement contribué à financer, comme par exemple le film de Zach Braff, car on t’inonde de newsletter que tu ne lis pas. Savoir si, à ton tour, tu te lançais dans une souscription comparable, par exemple pour te financer une année entière d’écriture à plein temps, sur /// admettons, combien d’euros et de centimes tu saurais récolter (peut-être de quoi te payer l’équivalent d’une semaine de loyer ?).

    Tu te replonges, deux mois et demi après l’avoir mis de côté pour te concentrer sur autre chose plus urgent, sur la page Mueller.html ; tu en es au vers 480 sur presque 4000. Patience.

  • 171213

    26 décembre 2013

    Tu te demandes comment fonctionnent les dynamiques, les trajectoires qui font que l’on suit ou non telle ou telle personne, tel ou tel auteur, telle ou telle voix, telle langue. Et, surtout, ce qui fait qu’on continue à les suivre. Tu te poses la question car il t’arrive fréquemment de te faire semer par quelqu’un qu’il t’est arrivé de suivre parfois pendant des mois voire des années. Quand tu dis suivre, tu penses surtout à Twitter mais aussi aux flux RSS. Par exemple, un changement d’horaires de travail ou de rythme de vie peut te conduire à utiliser Twitter à des moments de la journée différents : par conséquent, selon qu’il est plus ou moins tôt par exemple, ceux qui s’expriment ou sont actifs sur ta time line ne seront plus forcément les mêmes. Cela peut suffire pour perdre de vue quelque chose ou quelqu’un. Et, derrière, une question d’habitude : par exemple, tu as cessé de consommer les épisodes successifs de L’Enéide traduit par Danielle Carlès de la même façon car tu ne vois plus passer les tweets aux mêmes moments, voire plus du tout, par conséquent il t’est désormais impossible de suivre la série régulièrement, tu passes ton temps à courir après elle, via le flux RSS, quitte à lire par exemple plusieurs épisodes à la suite, ce que tu ne faisais jamais du temps où tu le lisais en direct, via Twitter. Même chose pour la série Sombre Ducasse, de Lucien Suel, que tu as tout bonnement laissé tomber (provisoirement tu l’espères), dépassé par la masse de billets en retard et non lus englués dans le flux ; plus il y a des mises en ligne, plus tu prends du retard et plus tu te sens découragé de trop l’être (en retard). Si ces comportements t’intéressent c’est parce qu’ils disent beaucoup de nous et de nos usages numériques : nous serions à la fois lunatiques (c’est ton cas) et malgré tout fidèle à une certaine routine (on dit veille). Par ailleurs, si ces comportements peuvent être remarqués et détaillés chez toi, ils peuvent probablement l’être également chez d’autres, et notamment chez certains de tes lecteurs. Possible, par exemple, que quelqu’un te décroche si tu l’as, toi, décroché. Tu le remarques également via Ulysse : Ulysse est une série régulière (un billet par jour, chaque jour entré dans la machine pour être publié à la même heure), par conséquent les lecteurs (du moins : les relayeurs) sont fidèles, c’est une mécanique répétitive qui se met en place. Mais les relayeurs d’aujourd’hui ne sont pas forcément les mêmes que ceux d’hier. Et, de façon plus général, il paraît évidement que personne, tu dis bien personne, ne suivra réellement le texte de bout en bout fidèlement, pas sur plusieurs dizaines d’années de déroulement toujours. C’est une espèce de voyage ouvert, Ulysse : on vient comme on veut, on suit un moment, puis on se détache du cortège. C’est un texte de rue, dit en déambulant, ceux qui te suivent te suivront un moment et, comme dans Ulysse d’ailleurs, repartiront d’où ils seront venus. C’est une idée, curieusement, qui te séduit beaucoup, et qui t’apaise un peu.

    Le deuxième épisode de l’adaptation radio de Sang et stupre au lycée est encore plus fort que le premier. Notamment cet extrait.

    Extrait Sang et stupre au lycée

  • 221213

    30 décembre 2013

    Un livre est arrivé par courrier, c’est le mien. Une édition poche d’un recueil je sais pas quoi. Le titre n’est pas le même titre selon qu’on le lit sur la couverture ou sur la tranche et ce n’est pas mon titre. Les pages sont imprimées sur du papier de mauvaise qualité qui s’écorchent et la police utilisée est péniblement déchiffrable, je ne comprends pas ce que je lis, j’en demanderai un autre.

    Un peu moins de deux ans après avoir lancé ce projet, j’enregistre dans la machine le 1000ème épisode d’Ulysse, sa mise en ligne prévue pour dans 314 jours exactement. La progression réelle est à la fois plus rapide et plus lente que ce à quoi je m’attendais. Je ne sais pas à quoi je m’attendais. Je m’attendais à quelque chose d’inaccessible et d’évrestique.

    Je programme également l’épisode dit 692. Ce faisant, je réalise que le texto (en réalité le message) envoyé par le père de Stephen annonçant "Nother dying", "mère mourante" avec une faute de frappe, donc "nère mourante", est bien écrit "Mother dying" dans le flot de ma version numérique. De fait, la traduction de Morel écrit bien "Mère mourante", preuve que je me réfère probablement à la même version du texte que Morel, l’une des versions premières, truffées d’erreurs (ou, comme c’est le cas ici, d’erreurs par erreur corrigées !). Suite à quelques recherches je tombe sur cette page qui cogite sur la question. J’en traduis un extrait pour une note, le document entier (enfin la page) est disponible en portfolio.

    L’éditeur prie le lecteur pour son indulgence concernant les erreurs typographiques inévitables dans ces circonstances exceptionnelles.

    Note intégrée à la première édition d’Ulysse (1922).

    Il n’existe aucun consensus quant à l’étendue réelle de ces « erreurs typographiques » au sujet desquels Sylvia Beach s’est sentie tenue de s’excuser en 1922. Jeri Johnson a listé 293 errata indiquées par Joyce, Jack Dalton estimait en 1972 qu’Ulysse contenait « plus de 2000 anomalies », et, en 1984, Hans Walter Gabler soutenait que son édition synoptique révélait « bien plus de 5 000 variations par rapport au propre texte de l’auteur tel qu’il fut établi à partir des documents de sa composition ».

    (...)

    Leopold Bloom est, par exemple, « très irrité » lorsqu’il s’aperçoit que son nom de famille a été mal orthographié en « Boom » sur la liste de ceux qui sont venus aux funérailles de Paddy Dignam dans l’édition du soir du Dublin Evening Telegraph. Bloom range cette erreur dans « le lot habituel des non-sens et des bourdes résultant des erreurs d’impression » que l’on retrouve dans les journaux, mais cet extrait a aussi le mérite de mettre en lumière la sensibilité qu’a Joyce quant à la contingence et la faillibilité de l’impression. Malheureusement, ce passage fut lui-meme victime du même écueil d’impression puisque le nom de Bloom fut écrit correctement dans la première édition. De la même façon, le mot « world / monde » erroné dans la lettre de Martha Clifford à Henry Flower (« Je t’ai appelé vilain garçon parce que je n’aime pas cet autre monde ») apparut comme « parce que je n’aime pas cet autre mot » lorsqu’il fut pour la première fois imprimé en feuilleton dans le Little Review. Même chose concernant le télégramme reçu par Stephen disant « Nère mourante reviens stp père », il fut imprimé comme « Mère mourante reviens stp père » dans toutes les versions d’Ulysse jusqu’à l’édition de Gabler. Ces exemples confirment bien les observations de Fritz Senn qui remarquait que « les choses finissent souvent par mal tourner. C’est ce que Joyce a montré et ça lui est arrivé. »

    Cet incident, ici, celui de la nère mourante, est anecdotique, puisque je l’ai rectifié de moi-même. Mais qu’en est-il des 5000 autres variations recensées par Gabler ? Faudrait-il migrer vers l’édition Gabler de 1984 (avec les inconvénients que cela suggère au quotidien, ne serait-ce que pour recopier à la main les fragments, car évidemment il n’existe pas — ? — d’édition numérique de cette version 3). À voir.

  • 271213

    4 janvier 2014

    Je suis étudiant dans une université qui n’est pas celle que je fréquentais quand j’étais étudiant. À la BU, département littératures anglaises (c’est une espèce de boule en métal, c’est un observatoire) je traque l’édition Gabler d’Ulysses. Tout ce que je trouve, c’est une machine à écrire en état de fonctionnement, laquelle est accompagnée d’une note manuscrite où il est écrit l’incipit du roman. C’est ça le vrai Ulysse : c’est à écrire toi-même.

    Dans la vie véritable, j’ai de la toux dans le ventre et je me demande, au réveil, si l’édition Gabler d’Ulysse peut être utilisée aussi librement que l’édition originelle où si les droits sont différents (est-ce qu’une édition c’est une œuvre de l’esprit répondant aux mêmes lois qu’une œuvre littéraire en tant que telle ?) ; c’est une question qu’il faudrait poser à Lionel Maurel. Par ailleurs, j’en ai trouvé assez facilement une version epub mais s’agit-il d’une édition libre de droit ?

    N. et L. au Méliès. L., je ne la vois quoi une fois par an, une fois par an au Méliès. Je cherche vaguement quelques critiques sur Joyce, plus loin, Quartier Latin, N. cherche les Mille et une nuits, je ne trouve pas (ce que je trouve c’est un Abeilles de verre trop grand et dont le prix, sur la quatrième de couverture, est imprimé en balles), N. trouve, nous nous séparerons le long des mats un peu plus tard.

    Larbaud, parlant d’Ulysse, le personnage de L’odyssée, dans sa Préface à l’édition Gallimard de Gens de Dublin :

    Il est homme, et le plus complètement humain de tous les héros du cycle épique, et c’est ce caractère qui lui a valu d’abord la sympathie du [Joyce] collégien ; puis peu à peu, en le rapprochant toujours davantage de lui-même, le poète adolescent a recréé cette humanité, ce caractère humain, comique et pathétique de son héros. Et en le recréant, il l’a placé dans les conditions d’existence qu’il avait sous les yeux, qui étaient les siennes : à Dublin, de nos jours, dans la complication de la vie moderne, et au milieu des croyances, des connaissances et des problèmes de notre temps.

  • 281213

    5 janvier 2014

    À partir d’Ulysse 695, passons enfin sur des fragments enregistrés initialement dans Spip, et non plus dans un traitement de texte extérieur (Pages), ce qui signifie que la programmation des pages le dimanche s’en trouve simplifiée, mais surtout que les révisions couvrent une période allant du premier jet à la mise en ligne, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent (les premières corrections intervenant hors ligne, dans Pages, elles n’étaient pas enregistrées dans la machine). Quelques approximations sur les Ulysse 691 à 694 car les fragments se sont retrouvés décalés d’un cran pour une raison qui m’échappe, mais tout fonctionne à compter du 695.

    Pas eu le temps ni l’énergie visuelle de me pencher sur les Ulysse à venir (1001 à 1010), obligé de remettre à plus tard et d’attendre que le Relpax se dissipe, comme se dissipent les fireflies de Mark McGuire sous le plastique du Mac.

  • 160114

    24 janvier 2014

    (...) ils viennent de franchir les premières maisons de Villemort — enfin, ce qu’ils appellent maisons, des maisons fondues, mangées par les arbustes, inhabitées, sans vie : parce que la vie des hommes on la perçoit à de petits détails perceptibles même dans le noir et sous la neige : comme des pots de fleurs, comme une propreté, comme une gaîté, peinture des persiennes, crépi des façades.

    Lionel-Édouard Martin, Nativité cinquante et quelques, Le Vampire Actif, P. 203

    Un gigantesque aéronef chinois s’écrase sur les cimes parisiennes et les immeubles longs s’effondrent comme une claque. Une foule de survivants tente d’échapper aux nuages de fumée carbonique et disparaît sous terre où elle trouvera quelque chose, quelque chose hors du rêve.

    Il va falloir trouver le temps de rentrer à nouveau dans le cambouis d’Ulysse et (dans l’ordre) en corriger les cartes récalcitrantes (en profiter pour gruger et poser des iframes), relire et remanier le chapitre Télémaque, augmenter les notes, éventuellement recomposer les heures et préparer quelque part une version dite dense pour une lecture hors web, embarquée en ebook, à vendre ou à donner (ou, plus probablement, les deux via la solution PWYW — Pay What You Want — utilisée pour In rainbows ou Private eye qui vise à mettre en vente un produit dont le prix est laissé libre, y compris à zéro). Mais quand ? Quand faire tout ça te dis-je ?

    Mon V. en poche semble non lu, non écorné, non éprouvé par l’âme. C’est le cas. Celui qui l’a lu ce n’est pas moi ; ou, du moins, n’était pas moi à la lecture car, non, je n’en ai rien tenu. D’où la relecture en anglais. Précisément cramponné aux sons, aux mots, à la rupture fragile entre les pages.

    Le soir, seul, soupe de poisson dans un bocal en verre, une gorge, la mise à jour du Mac pendant des heures de la 10.6.3 à la 10.9.1. Schubert. Un interface humaine mandatée par l’INSEE et l’élégance du tout nouveau reader Netvibes.

  • 180114

    26 janvier 2014

    Un retour de la crève qui me couvre depuis bientôt quatre semaines. Je suis comme ça je compte. Et ça ne s’en va pas. Quand ça fait mine ça reparaît. C’est cyclismique.

    Réécriture de mon Transoxiane épisode un chapitre 15 selon les voeux de mon moi parallèle ayant opéré sur le texte en décembre dernier. J’utilise des prénoms que j’utilise pour d’autres. Je m’appuie sur Pynchon et sur V. quand j’ai du mal temporellement parlant et j’isole des passages hors du texte en précisant en préambule les mots à situer. Dessous, c’est du Schubert.

    Refonte de la page 1 d’Ulysse. Récupération de la carte, qui avait disparu depuis plusieurs mois suite à une modification du code d’intégration des pages Openstreetmap. Désormais, on passe par une iframe (une iframe contenant une iframe) pour éviter d’avoir à changer le code sur chaque page si d’aventure un autre problème survenait (ou un changement d’opérateur de carte éventuel). Changement dans les heures également, et c’est quelque chose que j’ai en tête depuis des mois : resserrer le créneau (entre 8h et 8h45) pour arriver à un mot clé par minute. On ouvre avec le chapitre Télémaque et ses 365 pages pour 45 minutes, soit un changement de minute toutes les 8.11 pages. C’est un système plus fidèle il me semble que de se fier au nombre de mots, mais qui exige nécessairement de faire le calcul après coup, une fois le chapitre terminé et intégralement mis en ligne. D’où l’utilisation, malgré tout, d’un créneau élargi provisoire pendant la progression du chapitre. Enfin, la révision du texte lui-même, qui passe par un changement de premier mot (qui doit contenir, comme en anglais, le oui final du monologue de Molly Bloom). Pour ça je peux me servir d’un dictionnaire des rimes en ligne. Il y a 639 mots qui contiennent le mot oui. Voici des pistes possibles :

    Grassouillet, Buck Mulligan...
    Homme-grenouille, Buck Mulligan...
    Gouine, Buck Mulligan...
    Fripouille, Buck Mulligan...
    Ebouillanté, Buck Mulligan...
    Rouillé, Buck Mulligan...
    Couillon, Buck Mulligan...
    Andouille, Buck Mulligan...

    Et ainsi de suite. Je penche pour l’homme-grenouille. Mais sur cet autre site il est possible de décomposer les mots contenant ces trois lettres et ce qu’elles se suivent ou non. Voici les quelques mots retenus : quoi, orgueilleux, prodigieux, poilu, au poil. Au poil me plaît mais il est en deux mots. Et je fais semblant d’oublier (ou j’oublie réellement) que l’enjeu c’est aussi de conserver le i final en première lettre, un casse-tête finalement résolu : inouï l’heureux élu.

  • 080214

    15 février 2014

    Marchons sous la surface de l’eau. La lumière est superbe, les yeux intacts. J’aimerais prendre des photos de la surface vue d’en dessous. À un moment donné de l’intrigue, on me met devant les yeux une édition rare des Collected Stories de Amy Hempel. Ce tirage comprend un texte de plus par rapport à ceux que je possède déjà, c’est un récit ancien, inédit à ce jour, anoté aux crayons de couleurs. Éventuellement, à un moment ou à un autre, la question de la reprise du souffle devra se poser.

    Nouvelle cadence, depuis quelques semaines, pour l’Ulysse intérieur, celui du back office, celui qui travaille en amont de la publication quotidienne. De dix fragments par semaine, je suis passé très naturellement à vingt. Dix le samedi matin, dix le dimanche. Aucun problème pour garder la cadence. Et, bien évidemment, cela ne se voit pas dans la progression régulière et la mise en ligne des phrases chaque jour.

    Fuir. La rubrique Critique est devenue la rubrique Lectures. C’est mieux. Pour la reprendre en main (le dernier article en date c’était il y a un an et demi), commencé à écrire quelque chose sur Urbs de Raphaël Meltz, mais Safari m’a planté au milieu, tout perdu. Ce qu’il serait juste de dire sur ce livre c’est qu’il est éminément agaçant mais non dépourvu de tendresse. Peut-être qu’une chronique devrait en rester là. En dire plus ce serait tourner autour de cette unique réalité.

    Nymph()maniac volume 2. Si près de l’écran ce ne sont plus des pixels mais des taches éphémères, des essaims de flous mats qui scintillent par moment. Les volumes 1 et 2 mis bout à bout font quatre heures ; on aurait pu s’en tenir à trois (et s’épargner la fin). La photo tirée du film ici n’est pas celle que j’aurais souhaité prendre. Il s’agit d’un plan fixe, Charlotte Gainsbourg est seule et floue en arrière, au premier plan les branches d’un arbre qui pousse au flanc de la falaise, tordu, on le voit sans recul, partiellement. Une autre image, c’est au début du Miroir, hier, donc bien avant que je tombe de sommeil, l’homme du début se retourne sur la femme du début, un vent très fort fonce soudainement sur le champ et renverse les herbes.

  • 160314

    23 mars 2014

    Songe plus ou moins à intégrer, en sous-rubrique de la rubrique dite Moelle, une partie intitulée Études, laquelle pourrait rassembler quelques textes libres de droit, je pense par exemple à un circuit dans le labyrinthe de l’Encyclopédie, le tout dispatché en trois ou quatre colonnes sur page (mais quatre ce serait beaucoup), avec une zone de notes en marge élargie, et une colonne à gauche laquelle pourrait contenir des images issues par exemple des manuscrits. Pour un autre usage, il serait possible d’y rassembler des chapitres entiers de l’Ulysse, y aménager alors une séparation pour faire bilingue, ce serait peut-être dicté par la troisième colonne, peut-être que ce serait interne à la composition de l’article (une simple table valign="top" devrait suffire).

    Fin des relectures lentes de Transoxiane deux. Peu de surprises ou plutôt si : plus de plaisir à lire, avec l’oeil étranger, ce que j’ai pris le moins de plaisir à écrire. C’est pesant car ça ne représente qu’un tiers du bouquin. Pour le reste, retendre l’intrigue. Gommer l’incohérence. Probablement, comme le craignais déjà jadis, gommer le tout premier chapitre et en glisser un de plus vers la fin. Du boulot donc. Prévoir un mois de plus, fin avril pas fin mars.

    Mise à jour du journal des activités migraineuses, échantillonnages de la douleur & tentatives de géolocalisation des crises jusqu’à février 2014. Satisfait. Revenons progressivement aux chiffres de 2008, au début de l’archivage des données. Je ne crois pas qu’on puisse arriver un jour à une douleur zéro ou une médication zéro.

  • 160414

    23 avril 2014

    Pirate and Osbie Feel are leaning on their roof-ledge, a magnificent sunset across and up the winding river, the imperial serpent, crowds of factories, flats, parks, smoky spires and gables, incandescent sky casting downward across the miles of deep streets and roofs cluttering and sinuous river Thames a drastic stain of burnt orange to remind a visitor of his mortal transience here, to seal or empty all the doors and windows in sight to his eyes that look only for a bit of company, a word or two in the street before he goes up to the soap-heavy smell of the rented room and the squares of coral sunset on the floorboards—an antique light, self-absorbed, fuel consumed in the metered winter holocaust, the more distant shapes among the threads or sheets of smoke now perfect ash ruins of themselves, nearer windows, struck a moment by the sun, not reflecting at all but containing the same destroying light, this intense fading in which there is no promise of return, light that rusts the government cars at the curbsides, varnishes the last faces hurrying past the shops in the cold as if a vast siren had finally sounded, light that makes chilled untraveled canals of many streets, and that fills with the starlings of London, converging by millions to hazy stone pedestals, to emptying squares and a great collective sleep. They flow in rings, concentric rings, on the radar screens. The operators call them “angels.

    Thomas Pynchon, Gravity’s rainbow

    Combien de fois l’ai réécrit ce chapitre ? C’est une question mathématique, j’espère. Après un certain nombre de relectures, il faudra que ça fonctionne, que je passe à autre chose.

    Reçu l’Ulysses annotated de Gifford et Seidman (livre papier), la version Google Book n’étant plus, à l’heure actuelle, pour une raison que j’ignore, mais ça n’est pas très grave, accessible.

    Je crois me souvenir qu’à chaque truc que j’écris ou réécris j’en viens à me dire, à un moment donné, pourquoi je perds mon temps là-dessus ?

  • 190414

    27 avril 2014

    Faudrait vraiment dresser une grille des tunes pour Ulysse. Voulais le faire, pas eu le temps de le faire. Cherchant dans les archives la valeur d’une guinea dans les précédents épisodes, je tombe sur trois fragments différents (le 83, le 160 et le 495), lesquels m’indiquent qu’une guinea, dans notre version actuelle, vaut tantôt dix euros, cent euros et cent-cinquante euros (parfois ce sont des balles). Harmoniser tout ça.

    Relu Transoxiane (le deux) sur de l’Eink Kobo. Quelques petites choses à modifier demain et ce sera bon.

    Trouvé N., I. et L. de passage à Paris (St Michel), un peu shooté peut-être (oui mais shooté à quoi ?). On me trouve fatigué, et bien c’est que je le suis, frigorifié aussi. L. me demande t’es heureux ? C’est le Louvre où nous sommes, je dis quelque part j’ai travaillé ici à un moment donné (je montre avec la main vaguement), L. me dit c’est censé être la Joconde ? Faut croire. Elle est pixélisée. Marchons marchons le long de nous-mêmes jusqu’à un resto entre le Num et le Pied de cochon qui n’est ni l’un ni l’autre. Je me brûle nos genoux. Quelqu’un dit subterfuge. Parlons de chais pas quoi. Quelqu’un dit encore une fois la phrase je sais pas ce qu’il faut faire. Prends des nouvelles de gens que je croyais plus ou moins méconnus (j’ai oublié des noms) : F. et Grenouille 4 ils font des vacations. F. n’a pas terminé son Master. Sur quoi il travaillait ? Proust. Je dis ah. N. m’offre le Eddy Bellegueule. Repars plus en vie que n’étais arrivé. Eux prennent un train pour le sud du sud de la ligne (et moi pas).

  • 210414

    29 avril 2014

    Bien bossé 5 : termine le chapitre Calypso avec l’Ulysse 1286 (8.60% de progression). J’ai emmagasiné à présent plus d’un chapitre d’avance, ce qui me permettra de calculer les heures sans avoir à en passer par un tag intermédiaire du type "entre telle et telle heure". En profiter aussi pour fixer les quelques 800 autres fragments non tagués dans le temps.

  • 100514

    17 mai 2014

    Quelque chose qui touche aux fondements même d’Ulysse. Travaille depuis le week-end dernier au tronçon 1320/1330. C’est le début du chapitre Lotus Eater, Bloom est passé à la Poste récupérer une lettre érotique envoyée par sa maîtresse épistolaire. Je l’ai traduit normalement, respectant la narration et les faits rapportés. Bien sûr, je me demande comment, de nos jours (rappelons qu’Ulysse par jour est une version d’Ulysse racontée au présent, dans tous les sens du terme), se déroulerait cette scène. Bloom n’irait rien chercher dans aucun bureau de Poste, évidemment. Il sortirait son smartphone de sa poche, se connecterait sur son Gmail parallèle ou son Skype, ou Snapchat. Voilà comment s’articulerait ses amours imaginaires. Il est possible de choisir cette option 6 mais je m’en suis tenu, pour l’instant, au récit officiel. Pourquoi ? Parce qu’il est très important que subsiste quelque part 7 le texte initial. Nous aurons tout le temps par la suite, après avoir réfléchi sur la question, et peut-être changé d’avis d’ici-là, d’actualiser le récit. Pour l’heure rien ne presse 8. La mise en ligne de ce passage aura lieu dans plus d’un an. Le temps de le réécrire et de le repenser plusieurs fois.

    J’ai acheté des livres mais je n’ai pas bougé de moi-même. Dehors c’est l’octobre. Suis pieds nus dans ma tête. Retouche un peu le Transoxiane un.


  • ↑ 1 Voire élaborer des scénarii parallèles : par exemple, utiliser les deux systèmes en même temps, et justifier de leur léger décalage en appelant l’un, montre de Stephen et l’autre montre de Bloom.

    ↑ 2 Lapsus clavier : je l’écris lll.

    ↑ 3 En réalité, il existe une version numérique de cette édition et je l’ai piratée.

    ↑ 4 Ce n’est pas son vrai nom Grenouille, c’est nous qui l’appelions comme ça, enfin par nous encore je veux dire moi.

    ↑ 5 Il est question d’Ulysse

    ↑ 6 Peu d’obstacle à ça : on ne mentionnerait simplement pas la Poste, remplacerait la grille du guichet par des antispam et l’affiche de recrutement pour l’armée par un pop-up.

    ↑ 7 En l’occurrence dans les révisions.

    ↑ 8 C’était un mot écrit avec des lettres blanches dans l’escalier, chez mes grands-parents maternels, en Haute-Loire. C’est toujours d’actualité.