15 août 2010Faut que je m’entraîne à jouer du Kinzoute : quelques semaines de vacances blanches m’attendent. J’en ai eu la confirmation hier ou vendredi, la semaine de boulot qui arrive sera bien ma dernière. J’ai quelques papiers à remplir, quelques têtes à vider et simplement faire semblant d’être là (et y être). Je réponds à l’enquête lancée par Christophe Petchanatz : « Pourquoi j’écris ? ». J’écris d’abord pour dissimuler ce que je pense réellement. Je pense occuper ma semaine en recopiant les récentes lettres recommandées AR reçues dans le cadre de ce licenciement à peu près propre pour les ajouter au fichier Prudhommes.rtf dont il est probable que je ne fasse rien. on est grave --- on est franchement ringard --- on a le cerveau lavé bien profond --- on se regarde dans la glace --- on déborde sur les côtés --- on se fait son petit chorus pour la célébrité --- on se baigne dans l’eau recyclée régénérée réoxygénée --- les poissons aveugles stagnent à la sortie des égouts J’ai récupéré mon MacBook vendredi. Passé le week-end à faire des transferts de données, à réinstaller ce qui ne l’était plus. Le mac est neuf ou quasiment. J’ai gagné presque un an d’utilisation matériel en tapant dessus l’autre jour : c’est mal, oui (oui mais l’avait bien cherché). Je ne crains pas l’ennui, ni l’adversité, n’attends rien des mutations de la société. J’ai repris hier les relectures et corrections de Coup de tête partie 3. Il n’y a rien (de neuf) à en dire. Ma deadline initiale a été compromise par le crash du MacBook et reportée d’un mois. Je me fixe à présent fin septembre pour finir. Après se poser la question du qu’en faire et du où l’envoyer. Avril 1997, Pays de Galles, liste des pubs dans lesquels j’ai bu des peintes de bière : J’ai l’impression de prendre le Journal à l’envers : je n’y consigne pas ce que j’ai pu faire, j’anticipe sur les jours, semaines à venir. Des fois même je pipotte, je joue du Kinzoute, je remplis des vides. Je traverse aussi l’étonnant journal (1986 – 2006) de Lucien Suel, et donc il me traverse aussi. J’ai besoin d’autres journaux encore pour mieux vivre d’autres vies. Prochainement, une fois Omega Blue terminé et Fuir est une pulsion ouvert, je mettrai en ligne les archives du Journal préparées initialement pour Publie.net. Une version compilée 2006-2008, ni plus fictive ni moins fausse que la version actuellement en ligne, mais légèrement réécrite et réorganisée. 17 août 2010J’attends une demi-heure en gare de C. que le train reparte. En profite pour écouter le premier épisode du Voyage en Transsibérien d’Olivier Rolin sur France Culture (podcast d’hier). Écouteurs vissés près des tympans, n’entends plus rien du monde (le vrai). Les pieds collés au ciment, sur le quai, le train fixe et les rails secs, j’entends pourtant les rails taper, le train filer vers l’est : mais c’est pas le même : l’audio remplace le son. Je termine aussi Les versets de la bière, qui me rappelle Cambouis l’année dernière. on possède un jardin secret --- la lune n’a pas de profil --- tous les nombres premiers sont ex aequo --- la vie ne tient qu’à un fil --- on peut vendre son sang au détail dans certains pays --- les soldes se déroulent pendant les jours fous fous fous --- on enterre les monstres à six pieds sous terre --- un entrepreneur de démolitions entasse des briques dans son bas de laine --- on fait le plein de larmes aux pompes funèbres --- l’infarctus du myocarde est provoqué par la thrombose des artères coronaires En lisant besoin de placer des voix, des sons, sur les paroles papier (exemple : Quentin Compson est Chet Baker) ; en écoutant parler, lire, digresser Olivier Rolin besoin de placer un corps (une image) entre ses sons : j’y vois Brian Cox. Olivier Rolin a une belle phrase pour parler des notes à la volées qu’il prend à même le train, des brouillons fracturés de l’écriture, il dit : « comme un sismographe ». Je pense effectivement que la nature des notes que je rassemble actuellement via le fichier Prudhommes.rtf correspond à cette métaphore.
Boulot (ou ce qu’il en reste) : les jours de la dernière semaine blanche s’écoule lentement (J-3) et les métros, les trains, sont bien vides à 15h, bien plus qu’ailleurs. 12 janvier 2011À la manière d’un tueur (en série), la collection LaureLi, éditions Léo Scheer, revient sur les lieux dits du crime. Un an et demi plus tôt, début 2009, paraissait Écrivains en séries (saison 1, ce n’était pas dit mais tout le monde a compris), sous-titré « Un guide des séries télé » et qui était comme dit le sous-titre « un guide des séries télé ». 117 séries, précisément, que s’appropriaient 71 écrivains, précis eux aussi. Je renvoie à mon article de l’époque pour plus d’éléments sur cette saison 1. Si vous êtes attentifs et que vous allez jusqu’au bout, vous constaterez qu’en fin de billet je m’interrogeais sur l’absence de séries phares telles que Friends, Urgences ou Damages et lançais invitation à moi-même pour aller voir une prochaine (et alors hypothétique) saison 2. Alléluia, mon voeu est exhaussé. Écrivains en séries saison 2 est paru cet automne, même éditeur, même collection, et Friends, Urgences, Damages sont de la partie. La saison 2 reprend la même formule que la première. Au programme 120 séries, 92 écrivains. Certains ont prolongé pour une saison supplémentaire, d’autres ont été remplacés par de nouvelles plumes. Le principe de base, lui, reste le même : laisser carte blanche aux auteurs pour évoquer leurs séries de cœur (ou pas), celles de leur jeunesse (ou pas) ou celles qui les passionnent (ou pas). D’un article à l’autre (une page pour les plus courts, dix ou quinze pour les plus longs) le genre peut varier, de l’article plutôt analytique à la parodie décalée, de l’expérimentation littéraire à la description pure. Comme pour le premier volume, cela permet de toucher tout le monde et tout le monde s’y retrouve, qu’on connaisse ou pas, d’ailleurs, la ou les série(s) mentionnée(s). Comme pour le premier volume encore cela entraîne (forcément) des irrégularités dans la lecture, puisqu’il n’est pas vraiment possible de tout apprécier de la même façon. Alors parcourir ce guide justement comme un guide, piquer à droite à gauche, lire ici et là, parfois en dilettante parfois pas, tant qu’à faire devant la télé et une bonne vieille série évidemment.
J’avoue avoir un faible pour les articles qui acceptent volontiers de se décoller de la série sur laquelle ils écrivent. Les textes humoristiques (celui de Claro en est un parfait exemple), les expérimentations littéraires (Danièle Momont sur les New Avengers, notamment) et les fictions décalées (voir pour ça l’extrait suivant sur Les Chevaliers de Wimbledon, mettant en parallèle Les Chevaliers du Zodiac et un match de tennis entre Roger Federer et Pete Sampras, très réussi) ont donc ma préférence. Les articles plus analytiques, bien que souvent réussis (celui sur Mad Men notamment), sont généralement plus lourds à digérer, moins fun à lire, mais comme dit précédemment c’est le propre des ouvrages composites.
L’une des nouveautés de cette saison 2, c’est l’apparition d’illustrations qui prennent part directement au sommaire et qui ne sont pas là simplement pour décorer. Exemple avec l’entrée Goldorak, avec reproduction du « Degaulledorak » du Tampographe Sardon, tampon que l’on peut commander, soit dit en passant, sur la page suivante. En prenant appui sur des fictions aussi codifiés que les séries télé, certains auteurs parviennent à en détourner les codes ou en exploiter les ficelles. Ici cette conversation en avion avec le Ross de la série Friends, retournant le rapport acteur/personnage (« Le deal était le suivant : nous devions mener la vie rêvée. », par Fabrice Colin), là une réinvention des deux premières saisons d’Urgences signée Lucien Suel qui s’appuie sur les titres de chaque épisode comme base d’un récit à contrainte (voir l’extrait ci-dessous, chaque passage en gras correspondant à un titre d’épisode), ailleurs un résumé des cultes Sopranos en quelques phrases ciselées (« On a pas toujours été gros faut pas croire », par Alban Lefranc). Voilà comment ces auteurs parviennent à réinventer la fiction tout en plongeant les mains à l’intérieur : la fiction comme matériau de base, c’est connu. Et c’est aussi l’enjeu d’un livre tel qu’Écrivains en séries saison 2.
Le plus curieux, dans ce deuxième volume, c’est de retrouver des séries qui ont déjà été traitées dans le premier. Curieux mais pas gênant, d’autant plus que cette fois, le guide des séries semble avoir fait le tour. Je ne pense pas qu’il y ait encore matière à faire une saison 3. Tout est déjà dans ces deux volumes, 1200 pages à eux deux combinés, l’un complétant l’autre, et s’il ne fallait citer qu’une seule contribution, citons avec plaisir cette traduction de Raymond Federman, intitulée Je me souviens du meilleur programme télé de 1991 et qui traite, bien sûr avec humour mais pas que, de (et oui) la Guerre du Golfe.
24 juillet 2011Sérieux : comme en novembre : un pull, un blouson. De ces chaussures des grosses semelles pour marcher dans la boue. Croisé personne dans toute la largeur toute la largeur du parc. Nombre de lapins vus : deux. Nombre de lapins croisés sans voir : si seulement.
31 août 2011Et l’ennui ? le temps me manque. Ils nous demandent, « ils » ceux qui virent nos salaires, d’être présents en chair, en os, sur le stand STAT qui se tiendra durant salon, semaine prochaine. Le salon est centré sur les humanoïdes de série « copycat » que notre boite fabrique, répare et distribue. Cette série d’automate qui nous ressemble le plus. Comment feront-ils, « ils » les visiteurs, la différence entre nous fixes et les modèles d’expos « presque vivants » ? Voudront-ils, eux futurs clients, repartir avec nos corps, ces corps les nôtres, jusque chez eux et, pire, STAT les autorisera-t-il ? Tant de lacune dans mes lectures me désespère. Mon texte peau(x) envoyé Dissonances pour prochain numéro n’en fera pas parti. Et bien merde, j’en écrirai bien plus. Une odyssée cosmique dite en vers justifiés.
26 octobre 2011Des panneaux posés sur le toit des immeubles, que capteront-ils quand l’œuf solaire s’éclipsera ? Bien sûr que j’ai envie d’y aller ce matin car ce matin Énée prévoit ni plus ni moins que de descendre aux enfers, Matriochka (cliquer)
moi avec. Je prends le sol de gauche, celui baigné, baigné de soleil. Je confonds la troisième personne du pluriel avec la deuxième, la deuxième avec la première. Je croyais avoir pris l’habitude d’alterner les langues des livres lus au quotidien mais je file un mauvais côton. Je traverse à la suite Simenon et Gadenne, Gadenne et Simenon, Simenon et Suel. Je lis Suel dans le train pendant qu’il lit mes trucs de train dans le sien. Lire Mauricette sur ou sous Bill Evans (ou l’inverse). Je me dis que peut-être, ici ou là, quelqu’un croise l’autre. Je me dis qu’il serait peut-être pertinant de dresser liste de tous les extraits évoquant l’accident de personne tel que je le connais, Matriochka (cliquer)
ai appris à l’aimer. « Notons que les passagers d’un train ne sont pas solidaires du train », dit le manuel. Ensuite évoque le cas des brosses TELOC. 30 octobre 2011J’ai pris la liberté de poser mon vendredi afin que H. et moi puissions dignement fêter ses vingt-neuf ans et dignement nous l’avons fait. On oscillle entre 59 et 65% d’humidité indoors. Je n’oublie pas de signer au dos du chèque.
16 décembre 2011Les brins de pisse des clebs, gelés, scintillent au sol. Joachim souffle. Un arbre est tombé sur la voie. Une tête patiente, pénible au quai, depuis 7h14. Je fais un mail au pouce pour prévenir de mon retard. Je croise un crabe en survet rose. Ses gants sont des tongs.
Souvent, dans ce journal, j’accorde plus d’importance à ce qui, réel, ne s’est jamais produit qu’à ces erreurs du jour, bien fausses, que j’aurais soit disant vécues. J’en fais un leitmotiv.
|
1er janvier 2012Je commence l’année plus ou moins comme la précédente. Je fous au four une pizza, surgelée, taille individuelle, mais pour deux, car trop mangé la veille, ce matin dormi tard, et sors dans son assiette bloc de foie gras médiocre offert comme prime par le taf avant Noël. Je termine sans trop voir le prochain vase communicant prévu chez Candice Nguyen, j’aurais pas cru arriver là, d’ailleurs saurais-je où j’en suis ? Je fais du vide dans mes douze disques durs. Je m’achète, en ligne et pour 224€, deux pairs de pompes et déconnecte. Je sais plus trop quoi lire. Et me rends compte, mais un peu tard, que les vers justifiés de Lucien Suel ne sont pas justifiés arbitrairement par la machine mais contiennent bien pour chaque ligne le même nombre de signes. Je devrais donc reprendre tout ce qui (mais si peu) a déjà été gribouillé pour préparer vies // et, curieusement, cette perspective, laborieuse, me remplit de quelque chose comme de la joie.
VO
29 février 2012
On existe, puisque c’est bissextile. Idem hier. Idem la veille d’hier. J’ai pas eu le temps reprendre aux doigts le clavier blanc pour rendre compte.
La rencontre c’est pas moi qui rend compte mais c’est eux, via Twitter, hashtag #vissac. Suis arrivé 13h37. Un quart d’heure après c’en était 16.
Après l’échange je signe, via stylos bleus, verts, roses, et des fois noirs du papier. Aurais pu, tout aussi bien, dédicacer sur téléphones de poche, au cutter sur l’écran, des charabias indélébiles. Juste avant retrouver H., plus tard, place de la Liberté, je remonte, au pouce, le fil twitter #vissac pour vérifier, peu sûr, que j’ai pas dit de conneries, ou pas trop.
Dans le sable compter : six donjons, une douve, un message en grandes lettres bâtons, quatre pattes et deux paires de pompes nôtres, un crabe (mort), un babet (vivant), un bâton à jeter pour Nesko qui rapporte, quelques autres grains de vie et des algues en extase. Le soleil se pointe. Demain repartir, c’est-à-dire aujourd’hui 29, puisque nous existons, puisque c’est bissextile. 8 juin 2012
Confie toute ma migraine à Kitano. A Scene at the Sea. Besoin d’un film comme celui-là : quasiment sans parole. Colle bien avec l’Ulysse du jour, sein blanc de la mer vague. Et quand il sort de l’eau, au début, son t-shirt est même sec. Comme ça que l’on émerge d’outrepart nous autres ? Indemnes ? 10 juin 2012
A voté sans les yeux ni savoir quel est le nom, la tête, du candidat, la candidate, plaqué(e) sur le bulletin soumis, les affiches déchirées sur les panneaux en fer tout du long place de l’église. Si un lecteur futur (très futur, suffisamment pour avoir connaissance de notre avenir à court ou moyen terme, soit son passé, et notamment un quelconque événement politique ou apocalyptique ou pré ou post insurrectionnel à venir) posait les yeux, quiconque seul sait pourquoi, sur ces quelques micro lignes, il aurait sans doute le droit de dire (de dire même et penser !) que je suis un connard, parfait symbole de mon époque, l’actuelle (et il aurait raison).
22 juin 2012
Comment vider la tête, et avec quoi et quand ? Pas un jour cette semaine sans qu’elle cogne. Levé matin 5h pour avaler ma drogue (un D, un F) puis recouché. Ensuite mieux. Je m’occuperai de ça en même temps que tout le reste : après déménagement Paris (mais le bail repoussé). D’ici là compiler les données brutes du journal des activités migraineuses. En faire des tableaux, graphiques, que la courbe s’agite (car je sais), laisser le doc tout voir, comme au bureau, pareil.
7 juillet 2012C’est dans le ruisseau que les matières Déchetter, c’est un verbe ? Une fois déménagement torché aurons sans doute plus jeté que gardé. Tant mieux. Arrivé devant la borne d’accès le truc pèse la voiture, pleine. Pesée bis, au sortir, vide sauf nous, devant la deuxième borne. La différence entre les deux poids mesurés correspond aux kilos balancés dans les containers. Pourquoi ne pas adapter ce système à la restauration ? Pesé en arrivant, en sortant, puis être facturé au gramme de différence ?
20 septembre 2012Dans le même temps, je suivais des yeux Besoin de faire une pause dans le journal, le rythme est trop fort, tous les jours depuis des jours c’est tendu. Moins j’en écris moins j’ai l’impression de vivre mais c’est faux : car en fait plus j’écris plus la tête elle se conditionne pour écrire alors à la fin, entre les retards de mise en ligne et l’emploi du temps général je me retrouve à écrire trois jours en même temps et puis je dispatche les paragraphes plutôt hier ou plutôt demain, mais quand on fait ça est-ce qu’on est quand même au plus juste ? Ce matin levé tôt pour reprendre le XB1 réécrit dimanche, continué hier soir, je parle de ce truc ///, et même si c’est pas encore ça je m’étonne d’être allé sur ces terres, j’aurais pas cru. Ce qui me gêne le plus c’est de perdre un peu le fil dans le profil psychologique du héros, j’ai peur d’aller trop loin dans la caricature, enfin non, mais de forcer le trait ou bien de n’être plus trop raccord avec ce que j’ai posé y a des mois. Le reste est plutôt encourageant même si je suis pas exactement là où je croyais être, mais c’était ça l’envie quand j’ai commencé à écrire vers justifiés : que ça me force à sortir une autre voix de moi-même et que ça m’entraîne vers ailleurs. Relu quelques lignes du Lapin mystique pour base canonique, mais surtout par pur plaisir je dois dire. Ma seule crainte c’est d’être trop inintelligible, mais ça, qu’est-ce que tu veux, je crois que j’aurais toujours peur de ça, crois que je serai toujours un peu dans la brume ou alors que ce sera trop rêche ou trop sec ou trop haché. D’écriture au tu ça me pousse dans des constructions opaques sinon on tombe très vite dans le catalogue d’actions mais faut que j’arrive à ménager un équilibre. Puis c’est tout au présent alors ces constructions ou les monologues intérieurs ça amène de la profondeur. L’XB1 est particulièrement long, aurais largement le temps de revenir dessus, en note mentale ou transcrite dans le journal, on verra ; car je peux pas faire de pause, si j’en fais tous ces trucs vont fuiter de mon crâne vide en moins de deux, personne les écrira jamais à ma place, la voilà la raison. 25 septembre 2012Je sais où je vais. Le frémissement des Reviens souvent sur Le lapin mystique, pas forcément dans l’ordre et pas forcément pour me guider dans l’écriture de /// mais aussi et surtout par plaisir. Pour ça que j’ai demandé hier, via Twitter, à l’auteur, Lucien Suel, l’éditeur, François Bon, et le serial codeur, Gwen Catala, ce qu’ils pensaient chacun d’une reprise de ce texte au catalogue Publie.
Pas étonné que ce soit compliqué, et me semblait bien que les vers justifiés, ou orthogradécimaux, non, aritmogrammatiques, étaient pas solubles dans le format epub, à présent le format standard d’un texte numérique. Par essence, l’epub est conçu pour permettre un affichage qui s’adapte automatiquement (« reflowable ») à la taille de l’écran de n’importe quel outil de lecture du moment (liseuse, tablette, téléphone, tatouage électroluminescent), d’où la difficulté de gérer les pages fixes et les contraintes typographiques propres à la poésie régulière (on est aussi censé pouvoir changer librement la police et la taille de la police, alors, avec des vers justifiés, forcément, ça coince). Suis d’accord avec François quand il me dit que de nouvelles formes restent à inventer, des formes propulsées et expérimentées sur et par le web, et que c’est à nous de les faire jaillir, de les sculpter, ces formes, mais vois pas pourquoi, pour autant, on devrait se priver d’écrire via d’autres systèmes, d’autres contraintes, sous prétexte que la standardisation de la machine les digère pas. Qu’on soit clair : ça me gêne pas de lire Le lapin mystique directement sur le site de Lucien Suel et ça me conviendra aussi, je veux dire moi personnellement lecteur, de le relire, demain, via PDF librement téléchargeable au même endroit ; je pense juste à la diffusion. Et puis, tout simplement, ce texte, il mérite d’être lu, voilà 1. Crois pas que ce soit une discussion stérile. Suis sûr que ce sera possible, à terme, en numérique, aussi, de faire une place à ces textes, ceux qui exigent un traitement éditorial particulier. L’espère. J’ai réagi là-dessus spontanément en tant que lecteur ; évidemment que dans un coin de ma tête je pense à mon ///. Jamais eu dans l’idée de l’envoyer à Publie ceci dit. Inadaptable. D’ailleurs, pour être tout à fait honnête avec toi, j’ai jamais eu dans l’idée d’arriver au bout du bout de ce truc. Je veux dire faut être sérieux. D’accord je me dis des fois qu’un jour j’y arriverai sauf qu’en réalité je pourrais jamais le boucler ce truc. C’est trop dur, même et surtout pour moi. Faut voir à moyen terme. L’ai déjà dit je crois : aimerais mettre en ligne une version bêta sur un site web directement. Pas un PDF, pas un epub, pas une livre-application, juste un site web : tentaculaire d’accord mais web, c’est tout. Alors, même dans mes rêves les plus fous, en partant du principe que ce soit possible de le finir, à 100% finir, ce truc, ce sera juste un site web de plus perdu entre des milliards d’autres. Car on lit pas sur web, ou en tout cas pas comme ça 2 alors la question de la diffusion c’est compliqué. Peut-être pour ça qu’en repensant à /// et de ce que je m’apprête à écrire là, maintenant, demain, hier, le très concret du coup, j’en ai presque la nausée, peut-être que c’est dû à cette histoire autour du Lapin mystique, peut-être que c’est dû à la tête, enfin peu importe. J’essaye de réfléchir à voix haute. Certitude : renoncerai pas aux vers justifiés parce que 1) c’est le cœur du truc et 2) j’en ai besoin pour écrire depuis d’autres voix que la mienne. C’est une priorité. Et bien sûr que c’est important d’être lu. Mais pas autant que de déballer ce qui doit être déballé. Tant pis si c’est interminable. Tant pis si c’est pas diffusable. Tant pis si on peut pas le monétiser. Tant pis pour ça. Je suis près à faire mon deuil de ça. Et c’est pareil pour Ulysse. L’important, c’est juste de le faire. Le faire, je pense qu’à ça. Parce que c’est ça qui me fait pulser et c’est à ça que je rêve paupières ouvertes, clavier mental, cobalt partout. C’est tout. 26 octobre 2012
Quelqu’un m’appelle Tahar et je suis qui, moi, moi seul sous mon épine dorsal, pour oser contester ce que ce quelqu’un sait ? Twitter m’apprend, semble-t-il, la mort de quelqu’un, et je remonte le fil via les billets, les mots très beaux de Joachim Séné, Anne Savelli, Pierre Ménard, Christine Jeanney, Christophe Grossi, j’en oublie, et il se trouve que je n’ai pas, pas encore, à l’heure où je me vois écrire ces lignes, lu l’Abyssal cabaret, de Maryse Hache donc, et que de Maryse Hache je sais surtout les vers justifiés du Semenoir et l’ombre du chat roux planant sur et que, quelques fois, bien souvent, nous avions simultanément partagé sans nous connaître les mêmes lectures et notamment des trucs de Lucien Suel et que nous en parlions, fort brièvement, via Twitter, donc, et qu’aujourd’hui seulement je créé un tag à son nom ici-même, dans Fuir, et que c’est bien dérisoire.
Quelqu’un lit, finalement, l’Abyssal cabaret, quelque part dans la nuit, pour la douce première fois. 20 décembre 2012Quelle heure est-elle cette heure où la nuit tombe ? (le ciel froissé par des ailles noires et ça croasse, demain c’est le solstice) La fin du monde annoncée pour demain prévoit son lot de divinités appelées, paraît-il, à descendre sur terre pour opérer sur le temps un grand reboot total. Je me demande, aussi, quelles têtes auront cesdites divinités (je pense qu’elles sont déjà autour de nous, elles ont des yeux, elles zyeutent, elles naviguent entre nous et nous ignorons tout d’elles). Lucien Suel me signale via Twitter l’inopérabilité des blocs dépliables sur la rubrique Ulysse depuis (suppose) la migration Spip 3. Faudra rouvrir le capot gris du code et puis tenter comprendre (je comprends pas). Chez moi sous Firefox ça marche. Sous Firefox, Safari, Chrome, Opéra et mes yeux ça fonctionne. Alors quoi ? Dans les petites pupilles, les hublots blancs d’immeuble, en face je vois les humains être (c’est une cité de verre), par transparence ils sont. Si tout est piratable, nous pourrions facilement activer à l’insu de quiconque l’œil pixel de leur cam et puis le cristallin bionique de chaque pour savoir ce qu’ils sont, ce qu’ils voient, ce qu’ils pensent, voire mastiquent, avalent, ce qu’ils ressentent aussi, ce qu’ils écrivent à l’encre délébile sur leurs poignets tordus à force de faire craquer leurs articulations : des pense-bête qui rappellent : dire à quelqu’un je t’aime avant la fin du monde. 23 décembre 2012J’ai noté une heure huit
à une heure vingt-et-un
et à une heure trente-deux
mais c’est faux. J’ai rien noté c’est faux. J’ai pris la cam enfin l’iPhone je l’ai pris et j’ai pris en photo ces phrases là pour mémoire. Ensuite je me suis endormi. Je twitte à Lucien Suel : c’est vrai, les blocs dépliables sous Windows et Firefox ne déplient rien depuis la migration Spip trois. Ce n’est pas le cas avec le nouveau site Ulysse, encore en cours de conception, alors ne chercherai pas plus à corriger la rubrique actuelle (elle n’en a plus que pour quelques semaines toute façon). J’écris l’Ulysse du jour (481-490) dans le canapé cuir, sans bouger ni d’ici là ni de mon Glass piano en arrière fond (évidemment les Metamorphosis). J’hésite à signaler à qui que ce soit ma présence ici-même (je me dis c’est à eux oui à eux de deviner où je suis (à moins que je ne sache rien faire d’autre que rien aujourd’hui)). 22 janvier 2013Beau pas savoir où vais-je avec ce truc Mueller, qued visibilité sur ce qui sera dit dans les prochains jours, c’est stimulant lire ce que Lucien Suel, Antoine Bréa brièvement disent. Tolkien, façon de dire la mort : « Voici mon fils, transpercé d’une flèche. À présent, il est au-delà de la parole. » Mueller (114 mots) : Mueller ouvre les yeux : il sait les langues qui Il ouvre les yeux : entre le mjek & une saure il 18 février 2013
Y aurait deux catégories de personnes : ceux qui nomment à voix haute ceux et celles dont ils parlent et ceux qui ne nomment pas, se sentent toujours obligés d’expliciter, à dire mon frère, ma soeur, mon collègue, mon boss, et je ne sais pas pourquoi mais je me suis toujours senti très envieux des premiers. Onzième jour que l’oeil gauche rebondit et non-stop. Est-ce que j’ai fait quelque chose pour que ça s’arrête ? Non. Est-ce que j’envisage de le faire ? Non plus. Est-ce que je vais m’abstenir d’en rendre compte ici et de râler par écrit dans le journal ouvert ? Bien sûr que non. Donc commencé Le portrait. Ne l’avais jamais lu. Profite ici de la nouvelle traduction de Christine pour Publie. Je suis d’accord avec le mot écrit par Danielle Carlès ici-même : relief. Le soir, Tout le monde dit I love you. L’ai déjà vu le 12 septembre 2009, et si je connais la date c’est que je vais chercher, dans le journal des choses factuelles, le jour précis, après quoi je remonte lentement le fil des jours et je bois quelques années plus tard mes propres notes, dont une, savoureuse, le 21 novembre 09 : Décision : découvrir Lucien Suel. Mueller (521 mots) : Une voix derrière le verre liquide d’Imke Leal. Aussi pour ça que j’aime écrire Mueller. Aucune idée dans quoi je vais plonger lorsque vient l’heure d’écrire la ration quotidienne ou plutôt si : je sais d’avance ce que je veux y voir : je sais que je veux une espèce de dialogue de sages entre Imke Leal, Mueller : mais je ne sais pas : vois pas venir ce monologue de plus de cinq-cents mots et surtout je sais pas : que le ton et la voix et le souffle d’Imke Leal est comme ça : nuancé : très très respectueux : acide également : agressif vers la fin : c’est un géant qui se domine : je l’ignorais : c’est venu de lui-même ou plutôt : c’est venu de l’écrire : alors maintenant je sais : qui est ce personnage : un rescapé de l’ancien monde : un homme blessé voire humilié oui mais voilà : très chevaleresque. Je me demande à quoi ça tient. Pendant deux semaines la seule envie c’est d’avancer pour en finir et puis sans s’y attendre : ce truc : le revoilà : l’élan. Je pourrais tenir des jours simplement sur le monologue de Leal. Peut-être le ferai. Suivant comment ces vers me portent. 2 mars 2013Départ pour l’ouest à telle heure. Apprends la mise en ligne, demain, de Coup de tête numérique sur Publie, alors je réponds yeah. Il me parle de Coup de tête, Lucien Suel, dans un mail très touchant, c’est ce que je lui réponds. J’écris ces quelques lignes bien plus tard, comme toujours, une fois le soir venu, dictées par les doigts mais bien cognés sous les arcades du crâne. Au Mans pour déjeuner aux 7 plats. Morlaix aux alentours de 17h34. Mueller (85 mots) : Une voix derrière le verre liquide d’Imke Leal. 21 mars 2013J’aimerais jeter un oeil au texte original d’Enig marcheur (ce que j’imagine ressemble assez à un thorax étoilé dont on dézipperait la fermeture éclair). Lisant cette version (le mot est super juste) de Nicolas Richard, repense à ce que j’ai lu (mais où l’ai-je lu ? probablement chez François Bon y a quelques années) de ce que disait Maurice-Edgar Coindreau sur la langue qu’il était allé chercher pour traduire le parler du Yoknapatawpha de Faulkner : le patois vendéen. Pour Enig on aurait transposé ou l’accent du nord ou le dire québécois (ou d’autres trucs ou les deux). Achète, au matin, un Libé numérique pour y lire la chronique de Lucien Suel sur Coup de tête, que je remercie encore. Ca commence à avoir de la gueule. Sais plus quoi faire de mes rêves. Avais, avant, une rubrique X dédiée dans laquelle je les stockais, plus tard sur Twitter en 140 caractères max, aujourd’hui rien. Là nous partons des jours dans des collines proches Kaboul qui sont aussi végétales qu’animales. Plus loin l’Afghanistan et des corps de gamins massacrés, chassés comme de la viande. L’un d’entre eux la peau nue sur un grill. J’ai mal au bras d’avoir porté, depuis la rue Montgallet, 10kg colisés en carton, mais là c’est plus le rêve qui parle. Apprends la mise en ligne des vidéos du PNF Lettres de novembre. Essaye de m’y apercevoir (mais coupe vite l’écran et puis cours me cacher). Mueller (173 mots) : Les corps sont décharnés. Sous la peau des os ou 7 juin 2013Peu de bons mots durent quatre lettres. Parents à Sushi Gozen pour bouffe puis préparatifs dernières minutes avant départ, demain, pour Londres. Cadeaux : ma mère m’offre Petite Ourse de la Pauvreté et mon père An die Musik de Schubert. Mueller (10 mots) : Les reflets dans l’oeil du Cap ont un goût fort. |
↑ 1 A la fin de l’expérience Ivoix, en juinjuillet dernier, on m’a demandé de proposer des textes pour la prochaine cession, la 2012-2013 et j’ai recommandé, entre autres, Le lapin mystique. Malheureusement, il est peu exploitable en l’état, l’ouvrage papier étant épuisé et la seule version existant uniquement sur le web. Pas sûr que le texte aurait été adapté pour des élèves de 1ère, encore que, pas trop la notion de ces trucs là, mais c’est juste un exemple.
↑ 2 Les pratiques de lecture web, elles s’organisent autour des flux de publication de tel ou tel site : on suit un site régulièrement et on y lit – comme on dit on s’y abreuve -, au fur et à mesure, les nouvelles mises en ligne. C’est super rare qu’on lise de façon linéaire, comme on le ferait, justement, d’un livre papier. Or le principe même du texte à choix multiple, livre dont vous êtes le héros, qu’essaye d’être ///, implique une organisation précise et une structure impec, mise en ligne directement et en totalité.