Il ne restait plus qu’un œuf dans la boîte ce matin et cet œuf était cassé, sa coquille craquelée et enfoncée sous elle, là où il était impossible de le voir sans manipuler l’œuf. Pas d’œuf pour mon petit-déjeuner, donc, ce qui un autre jour qu’aujourd’hui aurait pu m’être égal, mais là non. Là, je voulais mon œuf. On n’est pas censé manger des œufs tous les jours, disent les gens qui s’y connaissent et en œufs et en jours, sauf si on connaît la poule. Hier, j’ai vu passer une annonce : dix milles poules ouvertes à l’adoption je ne sais où pour éviter qu’elles ne finissent à l’abattoir, après avoir écoulé leur dix-huit mois de durée de vie en tant que poules pondeuses et j’ai pensé : où pourrais-je bien mettre dix milles poules adoptées, à part dans ma tête, enfournées dans cette pensée en train de se faire (et, en parallèle, à se défaire tout aussi rapidement) ? Il y a eu d’autres questions. Par exemple, quelles sont mes attentes pour cette nouvelle année, et la réponse tient en plusieurs réponses. Retrouver mes lunettes de soleil perdues ces dernières semaines. Retrouver mes autres lunettes de soleil perdues il y a des mois. Retrouver le petit couteau en céramique disparu il y a beaucoup plus que des mois. Revoir assez d’épisodes d’Escaflowne pour comprendre à quel moment on entend « If you ». Trouver quoi faire de Basalte. Il m’arrive de penser que ce serait plus simple si CL ne donnait tout simplement pas suite à nos échanges de l’autre jour : cela m’épargnerait d’avoir à faire moi-même un choix. J’ai pensé aux corneilles baguées par des ornithologues, et aux dites bagues qui leur font des chaussettes. J’ai pensé aux offuscations récentes suscitées par les gens qui dansent sur la tombe de Le Pen père, et j’ai pensé que le dilemme suscité (peut-on danser sur la tombe de quelqu’un ?) ne connaît que que deux stades de réponse graduée (oui mais Le Pen ? / oui mais Hitler ?). Nous en sommes au stade un. Puis j’ai pensé que dans une dystopie telle qu’on en trouve grosso modo partout, on pourrait très bien imaginer que les incendies de Los Angeles durent de 2024 à 2028, pour faire le trait d’union entre les deux éditions des Jeux olympiques, et au fait que personne, je dis bien personne, pour l’heure, n’est en mesure d’assurer que ce n’est pas ce qui se produira. Enfin, j’ai pensé à cette réponse d’un quidam à la publication de quelqu’un sur les réseaux prétendant qu’il existait une cinquantaine de portails dimensionnels dispersés un peu partout dans le monde : Le portail se trouve à l’intérieur de nous. Oubliez l’extérieur.