Marina et Sergueï Diatchenko



  • 040323

    4 avril 2023

    Je me souviens très bien. Quand mon frère a eu son permis de conduire, il a dit : ils me l’ont donné, mais en fait je sais pas conduire. Il devait avoir 18 ou 19 ans, c’était donc il y a plus de vingt ans, et ça m’avait assez horrifié pour que j’y repense régulièrement par la suite, me disant des conducteurs et trices sur la route que je voyais (ou que je ne voyais pas), sans doute à raison : peut-être ne savent-ils pas vraiment conduire. Et voilà que c’est précisément ce que je me dis (ils me l’ont donné, mais en fait je sais pas conduire) à présent que je l’ai, contre toute attente un peu, vu que jeudi l’examinateur est intervenu sur les pédales à un moment tendancieux. Mais voilà. Donc je l’ai. Et maintenant que je l’ai je peux me dire (même si je sais que c’est faux) : maintenant, je n’aurai plus jamais besoin de conduire. Me disant ça, j’ouvre un compte dans une banque en ligne dévolu à Bakélite, ce qui fait tout de même beaucoup trop d’activités adultes en l’espace de quelques jours, quelques jours durant lesquels, bien sûr, je n’ai pas écrit une ligne (sauf à considérer que ces lignes sont une ligne). Vita Nostra 1 :


    — Que va-t-il nous arriver quand nous aurons terminé nos études ? Zakhar laissa planer le silence.
    — Nous changerons. Tout changera. Notre vue, notre ouïe, tout notre organisme se transformera. Tout ça jusqu’à la troisième année. Ensuite... il y aura un examen décisif à la session de janvier. Et alors...
    — Alors quoi ?
    — Je ne sais pas. Tu crois qu’on nous raconte tout en deuxième année ? Mais, selon moi, nous cesserons d’être humains.
  • 050323

    5 avril 2023

    Les inscriptions pour le Marché de la poésie s’ouvrent et j’informe les organisateurs que nous n’y serons plus présents dorénavant. C’est le mot que je choisis d’écrire, dorénavant. On m’envoie en réponse un message qui m’apparaît tronqué dans le résumé fourni par la notification de l’application que j’utilise, et au lieu de lire c’est bien noté, comme il m’a été dit, je lis c’est bien. J’ai de plus en plus de mal à écrire avant une certaine décroissance de la lumière du jour. À partir de 17h30, je trouve l’énergie de le faire, ou plutôt le contraire, l’inénergie qui me permet d’avoir ce rapport un peu malmené à la page. Aller à l’essentiel. Ne pas s’éparpiller. Ne pas meubler. Ne pas chercher à occuper le temps, l’espace, mais précisément l’inverse. Toucher au but. J’ignore quel est ce but. Je n’écris pas de la grande littérature. Je ne suis pas très productif ni virtuose ni vertueux. Je ne suis pas ce genre d’écrivain. D’ailleurs ce n’est pas un mot dont j’use réellement, écrivain, au contraire, donc, de dorénavant. Vita Nostra 2 : Le monde est un texte. (...) Les hommes et les femmes qui s’y trouvent sont des mots...

  • 080323

    8 avril 2023

    Chili vététarien avec M. qui y met, elle, un verre de vin rouge (avant les tomates pelées). Il n’y aura malheureusement pas de cheddar fondu, mais des protéines végétales censées tripler de volume dans du bouillon alors que manifestement pas. Pendant, parlons de La maison dans laquelle, avant de bifurquer vers celle des feuilles, et puis Nostra Vita, Poor things, Clive Barker, Anna Burns, Ali Smith, Alien 4. Il fait 94% d’humidité dehors, un dehors qui tombe dru. Le soir, ce sera le concert de Wati Watia. Avant, aider à préparer tout, et ensuite aider à ranger tout, et entre-temps manger ce qui a été préparé (parfois par nous, parfois pas), avant de rentrer sur les coups de 1h.

  • 040523

    4 juin 2023

    Il pleut sur P. Sur mon ordinateur portable connecté à distance à ma tour à Paris (ou peut-être pleut-il, peut-être pas) je lis les mots caducité des accords collectifs dits zombies. Je fais de la relecture toute la matinée. À midi une soupe miso avec une omelette champignons olives parmesan, et puis de la féta, des noix. C’est bien. Il fait beau maintenant. Puis moins. Avant du mieux. Etc. C’est une bonne journée. Numérique 3 :

    — À ton avis, fit Maxime en regardant l’écran de son ordinateur, tous ces gens qui paient de l’argent réel pour des chiens virtuels sont-ils fous ?
    — Pourquoi le seraient-ils ?
    — Avec ce même argent ils pourraient acheter quelque chose de réel.
    — Quoi, par exemple ? L’amour ? L’amitié ? la joie de vivre, peut-être ? Maxime sourit.
    — Tout ce en quoi nous croyons existe, pas vrai ?

  • ↑ 1 Marina et Sergueï Diatchenko, L’Atalante, traduction Denis E. Savine

    ↑ 2 Marina et Sergueï Diatchenko, L’Atalante, traduction Denis E. Savine

    ↑ 3 Marina et Sergueï Diatchenko, L’Atalante, traduction Denis E. Savine