Il fait un temps splendide et plus de 20°, idéal pour s’enfermer neuf heures à la Bourse du travail stéphanoise, en face d’un caviste spécialisé en (c’est écrit sur la devanture) picologie, pour le salon des éditeurs indépendants, après avoir juré mes grands dieux que je ne mettrais plus jamais les pieds dans un salon. En fait, c’est bien. Même que je vends. Quand je ne vends pas, on feuillette un Féroce et on dit : je sais pas si j’ai besoin de ça en ce moment. Avant un très beau lévrier femelle. Quelqu’un feuilletant Féroce : ça c’est un gros livre. L’éditeur voisin, depuis son stand : moi aussi j’en ai un gros. Jour se passe. Quelqu’un ouvre Féroce et le referme de suite après avoir lu prologue. Je ne juge pas. Quelqu’un collectionne les cartes de visite ou marques-page gracieux. Je pense : même Satan a honte de son corps. Un monsieur passe son temps a écrire derrière son stand faute de clients qui me rappelle les mots d’Eff que j’écrivais religieusement pendant le Marché de la poésie. Après avoir noirci une douzaine de feuilles, l’homme en rature facilement les deux tiers : ruine se fait. Quelqu’un me chante Sea sex and sun. Quelqu’un avec un maillot de l’ASSE des années Konica Minolta. Quelqu’un porte une queue de cheval avec des buns (?) ronds près des tempes, ça lui fait un petit style. Quelqu’un me demande : ne prenez-vous pas des risques à ne pas mettre le titre et le nom de l’auteur sur la couverture ? Mais qu’est-ce qui n’est pas prendre un risque dans le monde tortueux du commerce des livres ? Nombre de Féroce vendus : sept.