Des putain de douleurs cervicales au réveil mais ça va : suffit de pas trop pivoter la tête à gauche. Un peu plus tôt ou tard, je termine Toi au moins. Après le livre et la postface il y a un truc qui s’appelle « Journal de bord du traducteur » qui te permet de voir : de voir comment le texte a pu glisser d’une langue à l’autre. C’est la littérature avec l’échafaudage encore dessus, ça permet de savoir comment le texte (et, au-delà du texte, la langue qui le porte, l’habite) tient debout.

Les « ne ». Impossible de les garder tous. Impossible de n’en pas garder quelques-uns. Décisions au coup par coup, parfois difficiles, repentirs nombreux. J’aurais du mal à théoriser jusqu’au bout mes choix. En tout cas, je n’hésite pas à appliquer les deux solutions opposées à quelques mots d’intervalle. Trouvé après coup un soutien chez Claude Sarraute (Allô Lolotte, c’est moi Coco) : « Elle n’est pas mal. Même assez mignonne. Sauf quand elle porte des lunettes. Ça lui va pas. (… 2 lignes) Elle n’arrête pas de les paumer. (… 2 lignes) Je sais plus. 

Michel Volkovitch, « Journal de bord du traducteur » in Toi au moins, tu es mort avant (Chrònis Mìssios), Publie.net

La question des négations (car j’ai tourné et retourné cette question dans ma tête, écrivant Coup de tête, pour parvenir au même résultat que lui : des fois oui, des fois non) notamment. Cet extrait du Journal de bord, c’est aussi un cahier en miroir à Babel & blabla. C’est juste vital pour nous clampins 1 qui traduisons dans notre coin, seuls, sans trop savoir ce qu’on fait et comment on le fait, sans apprentissage propre.

Concision. Muscler la langue.
Comme pour Cheimonas, suppression de quelques pronoms personnels pas vraiment indispensables, et de nombreux « et ». « Et », ce grand mou.
Privilégier les mots d’une syllabe. Côté coup de poing. « … putain de ta mère, de ta sœur, de ta femme, et j’en passe. Il cogne, il jure ; moi, rien. Je le vise droit dans les yeux. » p.91.

Ibid.

De retour à l’oloé réouvert ce midi, soulagement. Ils ont augmenté leur tarif, m’en coûtera 40 centimes de plus pour une formule par jour, ce qui est toujours 80 centimes de moins que la boulangerie du coin de la rue pour mieux. Il faut que je parle de Toi au moins à celle qui tient la boutique parce que c’est important de le dire à voix haute dans l’océan du monde : même si personne t’écoute c’est important de dire.

Embrayé sur l’étonnant Romant dormant d’Antoine Brea. Plus proche du Poème d’amour de Soliman que de Méduses, mais plus proche encore des délires alphabétiques de Milorad Pavić et donc, au-delà, sans doute, de Borges. C’est déroutant à lire, ça mériterait d’être lu à l’envers (je veux dire dans le désordre) et on y trouve des phrases comme « Si quelqu’un dit que celui qui se voit circoncis en rêve est débarrassé de la rouille qui lui filetait le cœur il n’est pas loin de la vérité. » et « Si Dieu en rêve t’envoie une terrible épreuve pose ta langue sur l’angle d’une tombe pour montrer que tu ne crains pas le goût suret des morts. »

Couru sous la pluie du jour entier et sous la mystique du Requiem d’Akira, en boucle 2. Il n’y a presque personne sur la piste mis à part quelques malades mentaux qui font des pompes et piquent des sprints sans prévenir. Des croisements à plumes s’ameutent sur la terre ferme et boivent aux flaques blanchies, butinent l’herbe grasse, faut slalomer eux entre pour pas leur marcher dessus car ils (elles ?) possèdent le lac de Daumesnil. Au centre c’est beau : l’effervescence de l’eau du lac au contact des gouttes de la pluie. Près de la bouche de métro il me semble reconnaître quelqu’un. 3


jeudi 18 septembre 2014 - lundi 6 mai 2024




↑ 1 Je me souviens que P. l’utilisait ce mot : clampins.

↑ 2 4km04, 26’31.

↑ 3 Son nom est B., c’est un ancien collègue d’il y a quelques années, avant les licenciements en série, il avait été viré pour faute grave, il bossait sur des histoires de panneaux solaires, je bossais sur des trucs qui n’avaient rien à voir avec des panneaux solaires. Pas osé lui demander s’il était bien quelqu’un qu’il n’était peut-être pas.

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Guillaume Vissac est né dans la Loire un peu après Tchernobyl. Éditeur pour publie.net entre 2015 et 2022, fondateur en 2023 du laboratoire d’édition Bakélite, il mène également ses propres chantiers d’écriture et de traduction, principalement en ligne (mais pas que).

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