J’ai récupéré mon pass navigo après un petit jeu de pistes (à Saint-Philippe-du-Roule : voyez à Voltaire ; à Voltaire : voyez à Bastille ; à Bastille : voyez sortie numéro 7, vous situez la Banque de France ? Non ? Eh bien c’est là). L’adresse indiquée sur ce pass n’est ni celle où je vis le gros de la semaine, ni où je loge le petit. Ce ne sera pas non plus celle où je serai dans quelques semaines, ni celle où je serai dans quelques mois, quelle qu’elle soit. Quand je me réveille ici le matin (mais 4h25 est-ce déjà le matin ?), je peine à me souvenir d’où je suis. À Paris, mais pas rue T. Pas ou plus à P. Ailleurs. Quand je me réveille à P., je ne parviens pas à savoir pourquoi je ne travaille pas ce jour-là : est-ce que je suis de nouveau au chômage ? Est-ce que je télétravaille ? Ai-je oublié de me lever ? J’ai apporté du thé des moines au bureau avec une tasse zen pour me donner l’impression d’être ici chez moi. Je ne suis pas ici chez moi mais ça aide. Les salles de réunion sont tellement climatisées qu’on se pèle. Parce que la température est indexée sur le ressenti de l’homme blanc en costume cravaté ? Ce n’est pas très sympa de ma part de le penser, alors que toutes celles et tous ceux que je rencontre au gré de mes premières semaines m’accueillent avec beaucoup de bienveillance, et de gentillesse, cravate ou pas. Je bois mon thé en deux fois, avec douze amandes, devant le notepad++, or donc devant cette ligne en train de s’écrire. Je prends mes marques à l’intérieur du fichier que je suis censé publier chaque mois en interne, pour la revue qui m’emploie. C’est l’une des raisons d’être de ma présence ici, même si, pour le moment, je ne fais que constater l’architecture de la chose, et partir à la chasse aux polices. Pendant ce temps, le monde roule. Les partisans de Macron espèrent une remontada sondagière. L’UE déplore des foyers d’influenza aviaire hautement pathogène dans certains États membres. Tout ce que je déplore, moi, ce sont les majuscules non accentuées sous Windows. Vers 20h30, H. m’envoie un message : il est garé au même endroit que d’habitude pour me récupérer après mon train, preuve que ça devient effectivement déjà une habitude. Comme ça devient une habitude de trouver le moindre détail merveilleux, le moindre repas qu’on partage incroyable, tout simplement car nous sommes retrouvés.


samedi 3 juin 2023 - vendredi 26 avril 2024




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Article publié Article 260324 GV il y a 16 heures
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Guillaume Vissac est né dans la Loire un peu après Tchernobyl. Éditeur pour publie.net entre 2015 et 2022, fondateur en 2023 du laboratoire d’édition Bakélite, il mène également ses propres chantiers d’écriture et de traduction, principalement en ligne (mais pas que).

Livres : Vers Velvet (Pou, Histoires pédées, 2020). Accident de personne (Othello, réédition 2018) · Le Chien du mariage (traduction du recueil d'Amy Hempel, Cambourakis, 2018) · Mondeling (avec Junkuu Nishimura, publie.net, 2015) · Coup de tête (publie.net, 2013, réédité en 2017) · Accident de personne (publie.net, 2011) · Livre des peurs primaires (publie.net, 2010) · Qu'est-ce qu'un logement (publie.net, 2010)