C’est aujourd’hui que nous sommes censés recevoir les résultats de mutation d’H. et tout ce à quoi je devrais penser, c’est : où vivrons-nous bientôt ? Mais non. Je passe mon temps à me dire : juste avant sa mort, le corps de de Gaulle était tellement rabougri qu’il tenait à peine sous la forme d’une poupée en papier mâché. Lorsque son dernier soupir est venu, il a prononcé une parole militaire X ou Y (j’ignore tout des paroles militaires en ce bas monde et je ne vais pas commencer à m’intéresser à ces questions maintenant) et a commencé sa lente mais irrémédiable métamorphose en un genre de lapin papillon (les lapins papillons sont considérés comme particulièrement jaloux, ça en revanche je le sais). Ou encore : si le monde est la totalité des faits, non des choses, qu’en est-il du langage ? Des écritures. Sont-ce des choses ou des faits ? Ou autre chose encore ? Finalement, nous sommes fixés. Mais nous ne sommes pas fixes encore : H. est bien titulaire de quelque chose, mais cette chose est une zone et non un poste. Lui-même, il est considéré comme un bloc. Je crois donc avoir ma réponse. Le langage n’a rien d’un fait, et il a beau être une glaise dont sont faits les rêves, difforme, qu’on peut modeler en à peu près tout et n’importe quoi (par exemple pour faire semblant de dire une chose tout en disant son contraire), il est surtout un biais pour que quelqu’un arrive à ses fins (mais qui ? et pourquoi ? mystère). Somme toute, il n’est souvent qu’un élément issu de lui comme on dit maintenant, et pas le langage en temps que tel. C’est une langue en plastique, un faux, un fake, une copie. Pour autant, on fait semblant de l’accepter, tant nous nageons au quotidien dans cette parodie de vie qu’est la vie. C’est devenu naturel. Ce n’est pas devenu naturel de porter un masque dit grand public, mais enfin on s’y fait. On ne s’y fait pas : on irrespire. Mais alors quand on en vient à saluer quelqu’un vêtu de ça, et avec des lunettes de soleil, pas besoin de se forcer à sourire, puisque la personne ne distingue rien de soi. Une fois les lunettes et, ou le masque ôté, ne pas oublier de se laver de son visage de robot, cela dit.


mercredi 15 juillet 2020 - samedi 4 mai 2024




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Guillaume Vissac est né dans la Loire un peu après Tchernobyl. Éditeur pour publie.net entre 2015 et 2022, fondateur en 2023 du laboratoire d’édition Bakélite, il mène également ses propres chantiers d’écriture et de traduction, principalement en ligne (mais pas que).

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