J’ai cherché partout, sans succès. Je suis resté longtemps devant l’écran à attendre que de lui-même l’écran remplisse la page. J’ai laissé s’écouler la playlist en tâche de fond. Toutes les X minutes, c’est à dire souvent, la petite voix de Spotify disait que pour passer premium il suffisait de... J’ai réellement cherché quelque chose. Pour faire parler le mec invisible, censé être mon personnage, j’ai essayé, dans ma tête, de le rendre plus agressif et de durcir ses traits. J’ai écrit en fin d’après-midi un pauvre paragraphe qu’il faudra supprimer demain. En attendant j’ai repris le début pour le rendre rugueux.

Tout à l’heure un appel. La ligne est enregistrée au nom de H. alors, lorsque les démarcheurs appellent, c’est H. qu’ils demandent et tant mieux. J’ai dit à celle-ci que H. était absent, car c’était vrai. Généralement ils veulent savoir quand il rentrera, là mes réponses varient. Ce soir, tard ce soir ou je ne sais pas. Parfois dire qu’il est en déplacement à l’étranger, parfois simplement dire qu’il ne reviendra pas avant le douze octobre de cette année, ou bien plus tard. D’autres fois je dis qu’il me manque et j’aimerais qu’il revienne mais ce n’est pas forcément à moi d’appeler le premier pour m’excuser, pas vrai ? Si on demande à parler à madame, je réponds qu’il n’existe pas de Mme H. ou alors, si c’est le cas, que je n’apprécie pas tellement d’être mis au courant par une tierce personne non seulement qu’il s’est remis avec quelqu’un si vite mais qu’en plus que ce quelqu’un est une femme et qu’ils se sont mariés, a-t-on perdu le sens du tact ? Il m’arrive aussi de dire que je n’en sais rien, que je ne sais même pas quel jour on est, ni où je suis ni si je suis prêt, ou non, à arrêter la dope. Celle de ce soir m’a tout simplement demandé : vous êtes sûr ? Et à vrai dire je ne l’étais pas. Alors je lui ai demandé de bien vouloir patienter quelques minutes, le temps que je vérifie, et j’ai vérifié. Dans toutes les pièces, dans tous les coins, dans chaque tiroir, dans chaque placard, dans chaque fichier informatique et sous chaque plis de chaque vêtement suspendu à chaque cintre. Je ne l’ai pas trouvé, mais j’ai cherché partout. Et cette fois-ci j’étais sûr.