Je suis comme ce personnage d’une nouvelle de Brian Aldiss ¹ : bombardé de voix. Mais ces voix, ce sont les miennes. C’est facile d’entendre des voix en soi, il suffit de se parler. Comment faire pour se taire ? Faut-il fixer son attention sur autre chose que soi ? Quoi par exemple ? Qu’est-ce qui pourrait retenir une attention aussi volatile que la mienne ? Même écrire, ça ne retient pas longtemps grand chose, c’est même précisément l’effet contraire, ça canalise ce qui existait déjà, ce qui parle déjà, ce qui ne demandera qu’à parler, un flux, un timbre, un flot. Voix, donc. Il y a longtemps que la lecture ne suffit plus à me capter entièrement, à me haper en elle, puisque je passe mon temps, lisant, à écrire dans ma tête voire à réécrire ce que je lis, quand je ne suis pas tout simplement en train de prendre des notes, mentales ou non, dans le vue d’écrire là-encore quelque chose sur ces textes ou de m’en servir de base pour en apprendre plus sur l’écriture. Par exemple, narrativement parlant, je n’a rien lu de mieux que Black Hole de Charles Burns ces derniers temps. Non, la seule chose qui me détourne de moi, c’est de travailler à déconstruire et reconstruire mon site, à tester des prototypes, à coder des démos, à échouer mal, à échouer mieux, à tâtonner, à concevoir des architectures. Ça, voilà trois semaines que je me retiens de le faire, par pur principe de précaution. J’aimerais ne faire que ça de mes week-end, de mes soirées. N’être pas entravé par rien pour m’y jeter corps et âme. Réaliser quelque chose d’absolument unique. Et bien. Ce n’est pas possible. Au mieux pourrais-je y passer quelques heures, de ci de là. C’est tout. Si je parviens à m’y tenir, ce sera déjà une bonne chose. Mais ce n’est pas l’idéal. Mes voix ne cessent de me répéter (ou bien, qui sait, de me reprocher ?) que je ne vis pas idéalement, et que c’est un putain de problème. Que leur répondre ?